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Reportage

RAV, le nouveau golf

19-09-2013

Ils arrivent par nuées. Le stationnement du club de golf Royal Charbourg est traversé d’essaims de cyclistes qui se déplacent avec l’aplomb de bancs de poissons tropicaux. Comme dans un ballet aquatique, ils changent soudainement de direction, tous ensemble, guidés par le même objectif : rejoindre leur groupe.

Plus loin, des pédales automatiques qui s’enclenchent par dizaines cliquettent comme un spectacle de claquettes joué à l’accéléré. Les moteurs des véhicules d’accompagnement se mettent en marche, les motos de service portant des roues de rechange pétaradent pour signaler qu’elles s’élancent.

Ce n’est pas le départ d’une course, même si ça en a l’air. Nous sommes mercredi après-midi, il est un peu plus de 13 h, et c’est le cinquième et dernier rendez-vous du cinquième été d’existence du Regroupement d’affaires à vélo de Québec: le RAV.

Je reconnais des visages familiers au milieu des quelque 150  têtes casquées. Le chef proprio du Bistro B, François Blais. Son pote, le coureur pro Bruno Langlois. Marc-André Daigle, lui aussi coureur chez Garneau: il est parmi ceux qui sont à l’origine de ce projet, créé sous l’impulsion de Richard Garneau, fondateur et premier président. Et voilà Ivan Waddell, ancien coureur (ou coureur ancien, puisqu’il s’amuse encore chez les maîtres), cofondateur du RAV, qui m’accueille et s’empresse de me présenter ses frères d’armes avant que nous partions en trombe… Parce que je suis en retard.

On me demande dans quel groupe j’ai envie de rouler. J’ai l’embarras du choix. J’y vais avec le 32  km/h. Pour la longue sortie qui totalise 82  km. D’autres feront plus court (51  km), plus lentement (minimum 22  km/h) ou plus rapidement (maximum 35  km/h). «Ce n’est pas une course», précise le second et actuel président, Éric Amyot, associé chez Heenan Blaikie Aubut, lui aussi parmi les créateurs du regroupement qui compte 250 membres en plus des 10 têtes qui figurent au conseil d’administration. «Chacun choisit son rythme, son parcours, et nous respectons la vitesse moyenne que nous nous sommes fixée dans chaque peloton, poursuit-il. S’il y en a qui ont quelque chose à prouver, ils le feront ailleurs.»

C’est parti. Pour un parcours que je connais par cœur : Stoneham-et-Tewkesbury, Valcartier-Village. Ces bonnes vieilles équerres qui longent la rivière Jacques-Cartier. Les motos suivent tout près. Des encadreurs s’assurent du bien-être du groupe. J’avoue à Ivan que je suis impressionné par l’organisation qui semble parfaitement huilée. Non sans une certaine fierté, il constate que le RAV navigue sans heurt, à une vitesse de croisière enviable et selon des directives établies dès les premières sorties. Le temps n’a fait que transformer les intuitions de départ en certitudes, et il a galvanisé les pratiques du groupe, qui sont devenues des habitudes.

Premiers tours de roue
«Quand nous avons fondé le RAV, nous sentions un engouement pour le vélo de route. Il se passait quelque chose dans le public, et on voyait qu’avec la préoccupation grandissante des gens pour leur santé, c’était en train de remplacer le golf», se souvient Ivan Waddell. L’ACDA (Association cycliste en développement des affaires) à Montréal a évidemment servi d’inspiration, ajoute Éric Amyot. «Nous nous sommes dit que ce serait l’fun de faire du réseautage d’affaires et de mélanger nos deux passions», résume le président.

La première année, ils sont une centaine. Rapidement, ils atteignent le maximum de membres,  fixé à 250. «Et 75 membres sont là depuis le tout début», dit encore Éric Amyot, se réjouissant d’un aussi bon taux de rétention des membres, qui semblent pour la plupart ravis des services offerts.

La formule est, comme on le disait, d’une remarquable efficacité. Tous les deux­ièmes mercredis du mois, de mai à septembre, les membres effectuent une sortie en après-midi. Le lieu de départ et les parcours varient d’une année à l’autre. «Mais la plupart du temps, nous rayonnons à partir de clubs de golf qui ont des douches et de grands stationnements, et qui sont habitués de recevoir beaucoup de monde à manger», explique Ivan Waddell. Parce que la sortie à vélo est suivie d’un 5 à 7 et d’un souper de groupe où on discute, échange et tisse des liens entre amants de la petite reine.

Mais cela se traduit-il par de véritables occasions d’affaires? Ivan Waddell comme Éric Amyot affirment qu’il ne s’agit pas que d’un prétexte pour déserter le bureau, et qu’eux-mêmes ont pu y rencontrer des clients ou des fournisseurs.

Plausible, puisqu’on trouve un peu de tout, dans le RAV. Des gens du monde du cyclisme, évidemment, mais aussi des professionnels (du droit, de la santé, de la finance, etc.), des entrepreneurs, des vendeurs de tout et son contraire… C’est une chambre de commerce sur roues.

Sur la route
Chose certaine, un authentique sentiment de camaraderie émane du groupe. Dans le ton, le style d’humour et la familiarité des échanges, on devine les racines d’amitiés réelles.

En route depuis un moment en direction de Tewkesbury, ça flingue juste un peu dans les bosses, pour s’agacer. Mais autrement, le peloton roule ferme, tenant une bonne vitesse, sans montrer les dents. La journée est magnifique. Les remous de la Jacques-Cartier s’irisent d’argent tandis que nous plongeons vers la petite église avant d’obliquer vers la gauche.

Après avoir roulé au nord de la rivière, nous traversons allègrement le pont métallique à Valcartier-Village où, dans le parc au bord de l’eau, nous attend une fourgonnette devant laquelle on a déplié une table où sont étalés des barres énergétiques et de céréales, des gels, des bananes et du Gatorade. Il n’y a plus qu’à se servir et à discuter un peu. Québec étant Québec, en quelques minutes, on se découvre des amitiés communes, des accointances. Et c’est reparti pour la seconde moitié du parcours où nous nous ébrouons un peu plus, surtout sur les derniers kilomètres où il ne reste que quelques hommes forts qui s’amusent comme des enfants.

Parce qu’il y a beaucoup de cela, dans le RAV. Une légèreté. Ce sentiment que procure le vélo et qui, partagé, allège les rapports humains pour placer le plaisir avant les affaires.

Pendant ces quelques heures sur le vélo, ces hommes et ces femmes ne sont plus avocats, chiropraticiens, gérants de bar, cuisiniers, agents d’immeubles ou comptables. Ils sont cyclistes.

LE CLUB EN BREF
PRÉSIDENT Éric Amyot
FONDATION DU CLUB 2008
ENTRAÎNEUR Aucun, mais plusieurs cyclistes d’expérience assurent l’encadrement
MEMBRES 260, de 25 à 65 ans
RATIO HOMMES/FEMMES 80% – 20%
SORTIES Le deuxième mercredi du mois, à partir de différents points de départ dans la région de Québec, de mai à septembre inclusivement
INFO ravquebec.com

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