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En forme, Entraînement

Affûtage: Le comprendre afin de mieux le vivre

11-05-2018

Les biographies sportives sont remplies de récits d’athlètes qui s’affûtent avec succès, à commencer par les prétendants au podium du Tour de France! Une semaine avant le départ de la compétition cycliste par étapes, ne comptez pas sur Froome et compagnie pour aligner les heures de selle – ils sont plutôt en mode récupération, saupoudrant ici et là des pointes d’intensité relativement courtes, sans plus. Cette diminution progressive de la charge d’entraînement dans les jours précédents le départ de la Grande Boucle est ce qui explique – du moins, en partie – le succès qu’ils y connaissent.

Ce que ces récits relatent plus rarement, c’est le sentiment de perte de contrôle qui habite ces forçats de la route durant cette phase clé de leur préparation. Soudainement privés de leur fix quotidien de kilomètres, d’intervalles et de côtes, ils doivent désormais s’occuper à se reposer tout en essayant de continuer à aller vite. Une démarche d’autant plus contre-intuitive qu’elle survient alors que le désir de se prouver – à soi-même et aux autres – est énorme. De cette incompatibilité naît irrémédiablement un inconfort mental que les Anglos appellent taper madness.

Ce trac n’est pas réservé qu’aux cyclistes professionnels, loin de là. «Les cyclistes amateurs qui s’affûtent en vue d’une cyclosportive, par exemple, sont aussi susceptibles de l’expérimenter», confirme Myriam Paquette, physiologiste de l’exercice à l’Institut national du sport du Québec et candidate au doctorat à l’Université Laval. Contrairement aux vedettes (et à l’armée d’experts qui les suit de près), les amateurs sont néanmoins plus à risque de «tricher» au cours de l’affûtage

«Chez ces derniers, il y a un risque de succomber à l’envie d’en faire un peu plus que nécessaire lors de l’affûtage, de peur de perdre leur niveau de forme physique et pour se rassurer», prévient-elle. Cette tactique, qui s’apparente aux séances de «bourrage de crâne» que certains étudiants s’imposent avant un examen, n’a cependant pas la même efficacité; au contraire, cela nuit aux effets recherchés par l’affûtage. Alors comment faire pour ne pas devenir un véritable lion qui tourne en cage? Selon l’experte, bien vivre cette période exige une éducation. «On doit comprendre en quoi consiste l’affûtage, quels sont ses objectifs, ce qu’on peut en attendre ou pas, surtout si on en est à son premier affûtage», estime-t-elle.

Bref, il faut savoir (un peu) ce qu’on fait. Et pourquoi on le fait.
 

Quelques pistes pour bien vivre l’affûtage

Étendre l’affûtage sur 8 à 14 jours

C’est pendant cette fourchette d’environ une à deux semaines que la majorité des individus atteignent le pic d’amélioration de leurs performances. Dans le cas d’une durée plus courte, la fatigue prononcée avec laquelle on amorce la phase d’affûtage n’a pas le temps de se dissiper, ce qui empêche de tirer pleinement parti de sa forme physique. Une durée plus longue entraînera le scénario contraire: le repos est au programme, mais la condition physique pique du nez, bref, on souffre de désentraînement! Plusieurs variables, dont l’âge, l’expérience et le niveau de fatigue pré-affûtage, peuvent cependant influencer la durée de ce dernier. «C’est pourquoi il est important d’expérimenter différentes variations et d’identifier celle qui semble nous convenir le mieux», recommande Myriam Paquette.
 

Réduire le volume de 40% à 60%…

Le cyclisme a beau être un sport qui s’inscrit dans la durée, il importe néanmoins de résister au désir de réaliser de longs entraînements à basse intensité dans les jours qui précèdent une course importante. La raison: ce type de séance fatigue beaucoup. En réduisant le volume d’entraînement progressivement, on favorise la récupération sans toutefois nuire à sa condition physique. «Une baisse de 40% à 60% du volume d’entraînement pré-affûtage préserve les qualités d’endurance», précise l’experte. Dans le cas d’une semaine normale de 10 heures d’entraînement, cela représente une baisse d’environ 4 heures pendant la première semaine d’affûtage et de 6 heures durant la seconde.
 

… mais maintenir l’intensité!

Le conseil précédent ne saurait être complet si on ne maintient pas un nombre important de séances à intensité relativement élevée. Ce faisant, on préserve la forme physique mais on crée peu de fatigue – bref, on accomplit exactement le but recherché avec l’affûtage! Attention: on veillera à ajuster les séances à haute intensité afin qu’elles soient perçues comme de plus en plus faciles. «Pour y arriver, un bon truc est de commencer par mettre la hache dans les périodes d’échauffement et de retour au calme. Puis, au fur et à mesure qu’on progresse dans l’affûtage, on réduit la durée et le nombre de répétitions d’effort, on augmente les temps de récupération, et ainsi de suite», conseille Myriam Paquette.
 

Avoir des attentes réalistes

Une amélioration des performances de l’ordre de 3% en moyenne peut être espérée à la suite d’un affûtage. N’est-ce pas se donner beaucoup de mal pour rien? Il est vrai, certes, que ce nombre mérite d’être relativisé si on parle d’un athlète du dimanche. Dans son cas, les quelques minutes d’amélioration ainsi acquises auraient probablement pu l’être à l’aide d’un entraînement plus efficace. Mais pour un amateur chevronné, la question ne se pose même pas. «Pour lui, le gain de performance représente peut-être une ou plusieurs années d’entraînement sérieux. C’est hautement significatif!» s’exclame la physiologiste de l’exercice.
 

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