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Le blogue de David Desjardins

Parler à l’intelligence des gens

26-07-2018

Je l’écrivais récemment : je fais des efforts pour améliorer le vivre-ensemble routier. Pas grand-chose. Seulement ma part, même si c’est parfois symbolique et pas nécessairement plus sécuritaire.

Mais bon, il y a encore une légion de mongols à moteurs qui voudraient que nous disparaissions des routes. Ou alors ils n’ont jamais roulé dans le trafic et ignorent ce que cela signifie de se promener muni d’une armure de lycra sur un revêtement imprévisible, entouré de voitures, camions et autobus lancés à folle vitesse autour.

Tout ça pour dire qu’au moins deux fois par semaine, je me fais crier dessus. Parce que j’existe. Ou alors on me coupe, me frôle et/ou me klaxonne pour me faire peur.

Au fil des ans, j’ai adopté toutes sortes de tactiques pour y répondre. Pris de peur, il m’arrive encore de brandir le majeur.

Mais la vaste majorité du temps, j’utilise deux trucs qui, je le crois, sont les plus efficaces qui soient. Mais surtout, je suis convaincu qu'ils détiennent le potentiel de changer le climat.
 

L’extrême politesse

Lorsqu’on me coupe, m’envoie chier, me traite de tous les noms, je demeure d’une extraordinaire politesse.

Essayez de vouvoyer quelqu’un qui vous envoie chier, vous verrez, ça crée une sorte de froid, et modifie considérablement la dynamique. Tout d’un coup, le conflit est désamorcé. Y'a comme un malaise au lieu d'une violence, et vous voilà en contrôle de la situation.

Je suis parfois si poli que même si j’agissais comme serveur dans un relais et châteaux, je tomberais sur les nerfs de la clientèle qui me trouverait un peu obséquieux.

Et à la fin, la personne qui m'agonit d’injures se sent un peu minable. Mais il n’y a pas eu de chicane, d’escalade ni rien. Elle reste seule avec le sentiment d’avoir pété un plomb pour rien.

Et moi je pars en souriant.
 

Parler à l’intelligence des gens

Ce qui nous amène au second truc, qui donne un résultat analogue : parler aux gens de manière civilisée et exposer son point de vue afin de laisser celui-ci percoler jusqu’à leur cerveau.

Parce qu’au moment d’une altercation, il n’y a que de l’émotion. Et là, ce sont les préjugés et les raccourcis qui s’expriment.

C’est peut-être naïf de ma part, mais je suis convaincu que si vous parlez à l’intelligence des gens, le message finit par atteindre l'objectif.

J'utilise des vieux trucs de psychologues en médiation de couple: poser des questions, dire comment on se sent plutôt que d'accuser.

« J’ai eu très peur », « Si j’avais mal réagi, savez-vous que j’aurais pu tomber et passer sous vos roues », « Êtes-vous vraiment si pressé que ça va valait la peine de risquer la vie d’un fils, d’un fiancé, d’un père de famille? »

J'en ai des kilomètres des comme ça.

Que je livre suuuuuuuuuper calmement, là. Et toujours avec une infinie politesse.

Personne ne veut tuer des cyclistes ou les blesser. Sauf peut-être quelques psychopathes contre lesquels on ne peut rien. La plupart des gens savent qu’ils ont réagi sous le coup de la surprise ou de l’émotion lorsqu’ils s’en prennent à d’autres sur la route. En cas d'escalade, la réaction émotionnelle est validée. Le cycliste devient un adversaire, un con comme un autre. S'il agit autrement et s'adresse à l'intelligence, on désamorce le cycle de la haine, et on amorce celui de la réflexion intime.

Le soir, dans son lit, qu'on soit cycliste, automobiliste ou amateur de modèles à coller, on est toujours seul avec ses pensées. Et forcément, on finit par ruminer ses bons et mauvais coups. Une fois l'émotion passée, c'est à ce moment que les arguments que vous avez livré avec patience et politesse font leur chemin dans la tête des autres. Leur colère n'a plus de sens face à la raison.

Shit, j'écris ça, et je me rends compte que je suis devenu une sorte de Ghandi cheapo de la route…
 

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