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Non classé, Le blogue de David Desjardins

Le mois (de l’apothéose) du vélo

31-05-2021

Photo : Unsplash

Le mois du vélo s’est terminé dans une apothéose. Partout, des milliers d’amateurs, inondant les voies cyclables. L’heure n’est plus au prosélytisme. Il est à la célébration et à l’apprentissage du vivre-ensemble.

J’étais allé rouler avec Olivier. Un 100km bien tassé. Québec, Saint-Augustin, Neuville, Pont-Rouge, Sainte-Catherine, Shannon, Québec. Lui partait du Lac St-Joseph. On s’est rejoint au casse-croûte chez Micheline, sur la 138 à Saint-Aug, à côté de l’usine de Louis Garneau.

Je jouais au guide. De route en route, j’alternais entre des chemins qu’il connaissait et des découvertes. Des rangs déserts, des rues qui se laissent lécher par l’eau du fleuve et qu’il n’avait jamais empruntés.  Nous avons croisé des cyclistes à la douzaine. C’est une expression, les groupes étaient petits, se conformant aux édits sanitaires. Le soleil brillait. On roulait en court.

Dans le rang du Brûlé, nous avons vidé le réservoir avant le lunch. J’ai enfilé mon habit de souffrance et j’ai appuyé fort pour nous emmener à Sainte-Catherine comme un avion dont le pilote vous annonce qu’il atterrira plus tôt que prévu en raison d’un fort vent de dos. Oli était ravi. Il avance bien. Sa passion pour le vélo est comme celle qui habite le Québec en entier : elle croît vite et fort.

Le temps d’un burrito de dépanneur chauffé au micro-ondes, d’un petit Coke et d’un réapprovisionnement en eau, nous avons parlé de l’existence et de pièces de vélo. La vie, la mort, les roues de carbone et les capteurs de puissance. Puis nous nous sommes quittés à Shannon, quelques minutes plus tard. Moi je rentrais à Québec. Lui, au Lac.

Se perdre dans la foule

Je n’avais pas l’intention de prendre le Corridor des Cheminots. La piste cyclable qui relie Québec à Rivière-à-Pierre est presque toujours achalandée. Mais là, ça allait être fou. Ma curiosité l’a emporté. Je suis rentré par en l’empruntant sans trop me presser. Même si j’avais voulu je n’aurais pas pu.

C’était comme si on avait déversé un centre Vidéotron ou Bell ou autre dans ce sillon tracé en suivant une ancienne emprise ferroviaire. Beaucoup, beaucoup, beaucoup de vélos. Pas mal de coureurs, de marcheurs. Quelques patineuses et patineurs. Pas trop de monocycles électriques ou autres scooters trop rapides. Mais quand même. C’est un problème.

Il régnait un mélange de fébrilité, de joie et d’incertitude sur la piste.

Parce que tous les niveaux de compétence, de vigilance et les vitesses s’y côtoient dans une affluence extrême. Ça dépasse comme ça peut. Avec une politesse dont le spectre est comme le reste : plutôt vaste, disons.

Le confinement a définitivement déconfiné le vélo. Ce n’est plus qu’un sport, plus qu’un loisir, plus qu’un moyen de déplacement, plus qu’un jeu réservé à quelques individus. L’activité en est une de masse et sa popularité parait avoir entamé une lancée stratosphérique qui en fera une mode fulgurante ou un mode de vie. L’avenir le dira.

Pour le moment, il faut qu’on parle de vivre-ensemble. Sur les pistes cyclables comme dans les rues comme à l’épicerie comme dans les réseaux sociaux, il faut apprendre à respecter les autres, à faire preuve de la même indulgence envers les moins rapides que celle que l’on exige des automobilistes. Soyons gentils, polis, prudents. Protégeons les usagers les plus vulnérables. Soyons indulgents avec les personnes qui ont une moins bonne maîtrise de leur machine. Cédons le passage.

Et si pareille affluence nous déplait, allons jouer ailleurs. Les pistes débordent déjà dans les rues où nous avons le droit de rouler comme les voitures. L’ambiance n’y est pas parfaite mais elle semble s’améliorer chaque année. Je vois mes semblables faire preuve d’un plus grand respect des automobilistes, ces derniers le leur rendent.

Plus de gens qui font du vélo, c’est ça aussi : des conducteurs d’autos qui pratiquent l’activité, qui comprennent mieux comment on se sent sur la route, ou qui ont des cyclistes dans leur vie. De quoi humaniser tout ce beau monde. Leur prêter un visage familier. C’est pas encore la paix sur la Terre, mais comme chantait les Beatles : it’s getting better all the time.

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