L’an dernier, je me suis racheté un pur coursier de cross-country. Résultat : je n’ai jamais eu autant de plaisir avec un vélo de montagne. J’ai donc une question qui me taraude depuis…
Comment ça se fait que ce genre de vélo ne soit pas plus populaire ?
J’ai quelques pistes de réponse à ma propre question, et quelques constats sur les effets de mode et les conséquences de ce virage dans le sport.
La multiplication des genres
Prenez n’importe quelle compagnie de vélos de montagne. Farfouillez sur le site. Vous allez découvrir, si ce n’était déjà fait, que les modèles (à double suspension) se déclinent ainsi : aux extrémités, parfois un authentique vélo de descente, parfois un vrai de vrai cross-country (xc).
Mais pas toujours.
La constante, c’est entre les deux. Toutes les compagnies proposent des vélos de trail à enduro qui se déclinent de plusieurs manières (ça varie entre 120 et 160 mm de débattement, avec toutes sortes de géométries plus ou moins agressives).
Mais ce qu’on constate, c’est que, règle générale, les machines sont devenues plus massives et plus « suspendues ».
Les nouveaux venus dans le sport semblent souvent mesurer la valeur de leur engin, ou ses capacités potentielles, à un minimum de débattement requis.
Or, ce que moi je constate, c’est qu’un vélo plus léger, donc avec seulement 115 ou 120 mm de débattement arrière, m’offre pas mal plus de maniabilité, et que cette maniabilité compense pour une bonne partie des mm de débattement en moins.
J’y reviens plus loin.
La domination de la mode « enduro »
Clairement, la mode de l’enduro a beaucoup changé les mentalités.
Mon opinion tranchante : je pense qu’une partie de la clientèle est mal servie par ce type de monture. À commencer par les nouveaux adeptes. Et en particulier les femmes.
C’est encore plus vrai avec les vélos « entre deux ». Donc ni tout à fait enduro, ni tout à fait cross-country. Aux alentours de 140mm, mettons.
Les modèles avec plus de débattement sont plus costauds, donc les cadres et les fourches sont plus lourds. C’est parfois aussi le cas des roues (mais pas toujours). Et le groupe, ça dépend lequel on décide d’acheter. Mais au final, le cadre fait une différence majeure.
Ce sont des vélos qui sont fait pour aller vite en descendant. Si vous êtes débutante, voire intermédiaire, et que vous n’êtes pas particulièrement forte du haut du corps, ce genre de machine peut s’avérer difficile à piloter. Et en montant, ça peut devenir un réel boulet. Surtout dans les sections techniques qui nécessitent de manœuvrer dans les roches et les racines.
À l’inverse, un bike « cross », ça brasse plus dans les descentes. C’est vrai. La courbe d’apprentissage est donc plus abrupte. Mais les talents développés sur des vélos moins permissifs font, à mon humble avis, de meilleurs pilotes en général.
Et pour grimper, on est sur une autre planète.
Un changement passé sous le radar
Je n’ai absolument rien contre les bikes d’enduro, ou de trail. Je trouve juste que, la plupart du temps, ils sont « overkill » en termes de débattement et qu’ils nuisent à un bon apprentissage des compétences nécessaires.
L’avènement des vélos de « downcountry » ou « funcountry » ne semble pas avoir percolé non plus dans la population générale.
Pourtant, les exigences imposées par les parcours professionnels de plus en plus costauds ont largement contribué à créer une classe de vélos légers, maniables, aux angles plus permissifs qu’autrefois, qui permettent de s’éclater dans une variété de conditions.
Alors pourquoi ça pogne pas ?
Victimes de la mode ? Yessir…
Le cyclisme est un sport dont les adeptes, moi inclus, font preuve d’une forte tendance au grégarisme. Un effet de troupeau, si vous préférez.
Depuis quelques années, le bib en lycra a été remplacé par le short baggy, le maillot par le chandail décontracté… Une mode vestimentaire qui témoigne d’une mentalité dominante dans les pratiques. On a beau porter du lycra en gravel ou sur route, on enfile l’ensemble de montagne « lousse » pour aller jouer dans le bois.
C’était aussi mon cas. En changeant de gang et en rejoignant des adeptes du XC, j’ai aussi modifié ma pratique : de plus longues sorties, pas moins dures techniquement, mais où le short était de moins en moins adapté. J’ai changé de casque (un casque de route, sans visière) et porte désormais des vêtements en lycra qui vont à l’encontre des diktats actuels.
Je ne suis pas mieux que les autres. Il fallait que je me conforme aussi, juste autrement.
Par contre, c’est plus confortable, j’ai moins chaud, je peux transporter plein de trucs dans mes poches de maillot et celle de mon bib (de la bouffe, une pompe, des cartouches de Co2, un manteau s’il le faut, mon cell, un multi-outil, des clés à pneus, de la bouffe…) sans avoir à me trimbaler un sac d’hydratation sur le dos.
Et oui, avec un 120-115, ça brasse dans les descentes, mais je renoue avec une conduite nerveuse qui était le fondement de ma pratique. Ça m’oblige à m’améliorer, à être plus attentif, plus audacieux aussi parfois. Je constate que ma technique s’affine. Sans la béquille du « gros bike », je réapprends des réflexes perdus.
Je ne veux faire la leçon à personne. Je constate ceci. J’émets une hypothèse sur les compétences qui se perdent ou ne s’acquièrent jamais sur des machines parfois inutilement costaudes. Est-ce que je me trompe ? À vous de me le dire.