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Le blogue de David Desjardins

Charlevoix, loin des cartes postales

02-10-2023

Photo: Viktor Bytrov (Unsplash)

J’avais oublié à quel point Charlevoix est une région merveilleuse pour rouler.

Je n’y étais pas retourné depuis le dernier Grand Prix auquel j’ai participé. Je crois que c’était en 2018. L’idée : justement mimer le parcours du GP, en se rallongeant un peu puisque nous quittions depuis le condo de Charles L., organisateur de la sortie, situé dans la côte qui plonge vers Baie St-Paul en arrivant de l’Ouest.

Septembre est plutôt clément, encore cette année. Des manchettes et une veste suffiraient pour nous garder au chaud au fil d’une journée de températures en dent de scie. Au moindre nuage, suffisait de rezipper la veste, et hop.

Ça a mal débuté. En bas de la côte, le Di2 de Charles O. ne répondait plus. Déplogue le dérailleur, replogue le dérailleur. Rien. Déplogue la batterie, replogue la batterie. Miracle. Tout fonctionne. Nous repartons.

Je connais par cœur le Chemin St-Laurent qui se déroule en parallèle de la 138, à l’Est de la Rivière du Gouffre. Le épreuves du contre-la-montre, de la montée et du routier y passaient toutes les trois. J’ai dû faire le GP une demi-douzaine de fois, ça donne une idée. Cette route constitue une excellente mise en jambe, vallonnée, peu fréquentée.

Fonds de tiroirs

J’avais bu la veille. Pas tant que ça, mais j’étais épuisé par mon déménagement et je me sentais les jambes en guenille au départ. Comme dirait mon ami Shan, qui complétait notre quatuor ce jour-là : « ce #?*!-là, il s’en trouve toujours un peu de caché kekpart dans un tiroir ». Et effectivement, au bout d’une heure, après avoir exploré mes réserves, je m’étais trouvé de l’énergie et me sentais ragaillardi.

Juste à temps pour que l’effort cesse de m’abrutir et que je puisse profiter de la paix des lieux, comme la beauté parfois sauvage des paysages. À l’intérieur des terres, l’asphalte n’y est pas la plus belle et les villages sont parfois délabrés. Mais la rusticité du lieu a quelque chose d’absolument charmant qui n’est pas entièrement étranger aux paysages ruraux de France. Le charme de l’exotisme en moins, sans doute.

Saluons aussi la gentillesse des automobilistes, des gens croisés à la station-service où nous nous sommes gavés de sandwiches pourris (c’est le lot du cycliste de longue distance, je connais par cœur le menu des « postes à gaz » entre St-Tite et Deschambault en passant par St-Ubalde et Stoneham).

Vous roulez ici, avec les côtes, répétaient les locaux et touristes croisés ici et là.

Eh oui. Au final, un peu plus de 150km et 3700m de dénivelé. De la peau, comme on dit. Particulièrement dans la montée depuis le niveau du fleuve, à St-Irénée. De nombreux moments de pure détresse en course me sont alors revenus en mémoire. Je me suis vengé en mettant les réacteurs. Mais, comme un con, j’ai raté le bon virage et me suis perdu, devant demander mon chemin et ensuite chasser mes compagnons qui avaient obliqué pour rentrer vers Baie-St-Paul. Moins d’orgueil, plus d’orientation.

Le 1er Rang Est qui passe au Sud de St-Hilarion n’a certainement pas le plus beau pavage du coin. Ce n’est pas non plus un secteur facile : passé le stop du Chemin Cartier, il monte en casse-patte qui vous rentre dedans. Surtout quand vous essayez de rattraper d’autre monde devant.

Ça m’a rappelé toutes les fois où je me suis retrouvé dans un groupe de poursuite sur cette route, alors que les purs grimpeurs (ou les méga-cylindrées) nous avaient faussé compagnie dans la montée de St-Irénée.

Des laids, des laids

Mais c’était la première fois que je prenais le temps d’apprécier cette route forestière où le trafic est suffisamment épars pour que l’on compte de longues minutes entre le passage de deux véhicules. Le ciel passait du bleu au gris, mimant nos humeurs alors que nous grimpions, de plus en plus fatigué, mais aussi ravis par la majesté des lieux.

J’aime ces endroits qui sont beaux sans en avoir l’air. Évidemment que, depuis les Éboulements, en plongeant vers le fleuve, Charlevoix est magnifique. Mais pour le reste, comment dire. Ah tiens, en citant Gainsbourg qui parlait de lui-même: « la beauté des laids, des laids; se voit sans délai, délai ». Une fois libéré de l’obligation de l’émerveillement, on est touché par les petites choses qui donnent son caractère aux lieux. Les citernes défraîchies d’une ferme laitière. Les vêtements accrochés à une corde à linge qui semble faire 50 mètres. Les chemins de traverse qui épousent le paysage pour le meilleur comme pour le pire.

Évidemment que le plus joli point de vue ici est celui de Baie St-Paul. Mais embrasser le territoire, c’est aussi succomber à ses charmes cachés.

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