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Le blogue de David Desjardins

La course dans le sang

27-04-2023

Photo: Unsplash

La course cycliste est une drogue forte. Arrêter, c’est passer le reste de sa vie en manque.

Je me suis beaucoup amusé en lisant un récit de la bande d’Escape Collective dans lequel ils relatent comment ils ont inscrit un de leurs journalistes, ancien coureur, comme participant à une kermesse belge.

Une kermesse, comme dans une fête de village? Plus précisément, il s’agit de courses locales qui sont le plus souvent (quoique pas toujours) tenues en même temps que la foire villageoise, oui. On y trouve des jeunes qui aspirent à devenir pros, des semi-pros, des vétérans-espoir (héhé) comme moi. Tout ce beau monde se défonce sur les pavés, à travers les champs entourant le village, risquant ses os dans le froid et la pluie pour une sorte de gloire aussi passagère qu’insaisissable.

On y fait aussi des paris sur les vainqueurs. Les journalistes de Escape ont inscrit leur collègue, parié 10 Euros sur lui. Qu’ils ont perdu. Bris de chaîne, abandon. Mais l’histoire est savoureuse.

Je lisais ça et j’avais envie. Envie d’être là, de courser, de goûter le sang dans ma bouche, la brûlure des bronches, les jambes qui hurlent d’arrêter. Le souffle assourdissant du vent de face, le chuintement des pneus sur l’asphalte, le grondement des roues profilées, le frottement terrifiant des pédales qui touchent au sol dans les virages. Le « buzz » d’un peloton qui part en roue libre au même moment. Le claquement de la chaîne sur les pignons quand part une échappée.

Une fois que l’on a connu la course, elle ne nous quitte plus jamais.

Vélo-toxico

Tous les alcooliques et toxicos que je connais et qui sont sobres me parlent presque chaque fois que je les vois de leur consommation passée. C’est quelque chose qui les habitera à jamais. C’est à la fois une menace, un souvenir douloureux en même temps que celui d’une existence brûlante, folle, à vivre trop vite et trop fort.

Je suis pareil avec la course. J’y avais trouvé une drogue idéale : la proximité du danger et la compétition. Le premier a fini par avoir raison de la seconde. Mes importantes blessures en course ont fini par instiller chez moi une peur que je ne connaissais pas. Je me suis mis à douter de moi; dans un peloton, il n’y a pas grand-chose de plus dangereux qu’un coureur qui doute.

Alors j’ai arrêté. J’ai participé à quelques course de vélo de montagne, mais ce n’était pas tout à fait pareil. Il y a une folie incomparable à celle d’un peloton sur la route.

Depuis, je consulte quotidiennement des comptes Instagram consacrés à des chutes de peloton dans des courses d’amateurs pour me convaincre que j’ai pris la bonne décision et m’enlever l’envie de courser. Comme quelqu’un qui regarderait Leaving Las Vegas ou Requiem for a Dream pour ne pas se remettre à boire et à consommer.

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