Les voyages de vélo sont souvent ce qui tient lieu de carotte dans mon année.
Créer un groupe de discussion pour la préparation, s’échanger des saisies d’écrans pour décider des dates, du vol, partager des liens vers des apparts, des hôtels. Planifier ces escapades est une promesse d’évasion qui alimente le désir, me motive à m’entraîner et aiguise la patience quand je suis enseveli sous le boulot. Destination ce printemps : Majorque.
Les voyages de vélo avec les amis comptent parmi les choses qui me procurent le plus de plaisir dans mon année. En avoir été privé pendant si longtemps me l’a fait réaliser et il ne se passera sans doute plus une seule révolution de la Terre autour du Soleil sans que je ne transporte mon vélo à 10 000 mètres d’altitude pour aller atterrir sur quelqu’autre continent.
Destination Majorque
J’ai découvert Majorque en 2015, sous l’impulsion de mon ami Jacques. Nous avions roulé la Corse deux ans plus tôt et je m’attendais à semblable paysage. J’avais raison, et pas. Majorque est plus compacte, plus facile à traverser en vélo aussi. Sa chaîne de montagnes traverse le Nord de l’île, d’Est en Ouest. Le territoire, grâce à une autoroute efficace, se parcourt rapidement en voiture pour atteindre la côte opposée à celle qui baigne Palma, cite aéroportuaire de cet îlot des Baléares, au large de Barcelone.
Paradis du kitesurf, Mecque du vélo, repaire d’estivants qui y cherchent autant les vastes plages que les petites baies encadrées de pics rocheux où s’écrasent en vagues têtues les flots turquoises de la Méditéranée, Majorque recèle d’innombrables possibilités. Y compris celles de s’éclater dans quelques cols de légende.
Sa Calobra et ses virages étourdissants qui culminent dans cet entortillement lui ayant valu son nom (qui signifie couleuvre). Cap de Formentor, avec son phare et sa route qui s’élance dans la mer sur une lame rocheuse qui prend de l’altitude à mesure que l’on approche du but. Soler et son tunnel au sommet. Puig Major, qui domine l’île. Puis il y a ces dizaines de trouvailles, cols cachés dans d’étranges et luxuriantes forêts, plongeant vers des vallées désertes où s’étalent oliveraies et vignobles.
Attaque de Pierre et Rolland
Au centre, Valdemossa et son village historique sert de point de départ à mille autres lieux superbes. Deia. Inca. Andratx.
En mai, il fait chaud, mais pas trop. Des nuages s’accrochent parfois aux sommets. On enfile une veste pour la descente. Me voici à revisiter mes sorties, à lire des blogues, à piller les données dans Strava et à entretenir, sur notre groupe de discussion, des idées de grandeur.
Ça parle déjà de s’attaquer. Mon pote Shan et moi nous sommes surnommés Pierre et Roland, sorte d’hommage sarcastique à l’ex-pro français, reconnu pour ses innombrables attaques, plus souvent infructueuses que l’inverse, surtout en fin de carrière.
Les grivoiseries et les imbécilités qui émaillent nos discussions de voyage débutent d’avance. On s’entraine à ça aussi. On se met dans l’esprit. Manière de cultiver l’envie. Et pendant que le mercure plonge, ici, nous avons déjà un peu la tête ailleurs. En Europe, sur une île, dans la mer, à danser sur les pédales pendant que les ravers d’Ibiza, juste à côté, font de même sur les plages. Eux se défoncent autrement, par contre. Nous, c’est les watts.