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Le blogue de David Desjardins

Netflix et le Tour de France : une réussite

09-06-2023

Photo: Netflix

Juste pour vous, le jour de sa sortie, j’ai inhalé les 6 premiers épisodes de Dans le peloton (Unchained), la nouvelle série de Netflix sur le Tour de France. Divulgâcheur : c’est excellent.

Calqué sur le modèle de la série à succès sur la Formule 1 (Drive to Survive), Dans le peloton est produit (par la même équipe) avec un souci maniaque du détail, tant pour la forme que le fond, ce qui en fait un produit télévisuel irrésistible.

Je reviendrai dans un prochain billet sur plusieurs constats concernant le contenu qu’on y trouve, souvent fascinant et qui nous sort enfin des mêlées de presse et conférences soporifiques où les athlètes et les équipes débitent des lignes de texte prémâchées par l’équipe de relations de presse.

D’abord, je veux vous laisser le temps de le regarder (et moi de terminer les 2 derniers épisodes en fin de semaine). Ensuite, parce qu’il y a une analyse intéressante à faire de la mécanique de cette série.

Bref : voici pourquoi ça marche.

L’accès privilégié

Entrevues exclusives, témoignages poignants, accès à l’arrière-scène allant de la salle de massage à l’intérieur des voitures des directeurs sportifs et des bus d’équipe, on a droit aux réactions à chaud, à des révélations, des coups de gueule. C’est vraiment du bonbon. Mieux que d’autres séries du genre (comme celle de Movistar)? Oui, il y a encore plus d’exclusivités, de petits extraits d’après-course, de conversations glanées entre les rivaux à l’arrivée. Pour le fan, c’est magique.

Les récits personnels

Chaque épisode tourne autour d’un problème, d’un enjeu et des acteurs qui y sont confrontés. On leur parle, on saisit la nature des dilemmes, des craintes, des colères ou des doutes de chacun. On rencontre les familles, on leur parle, on découvre la vie privée des coureurs et comment ils gèrent l’équilibre précaire entre le sport de haut niveau et le quotidien. On voit comment les directeurs d’équipes motivent leurs coureurs, la souffrance lors de blessures et les difficultés psychologiques qui entravent le succès des plus grandes vedettes. Cet accès à l’humanité des sportifs est primordial et crée des liens intimes avec ces personnages.

Le sport expliqué

L’idée de ce genre de série, c’est avant tout de générer de l’intérêt pour un sport au fonctionnement parfois opaque. Vous ne comprenez rien au cyclisme? Vous voulez y intéresser votre frère, votre chum ou votre blonde? C’est parfait. Comme dans Drive to survive, ou Make of Break, la série sur la Coupe du monde de surf sur Apple TV+, le sport y est décortiqué, vulgarisé. En prenant l’exemple de Wout Van Aert dans les premières étapes du Tour, par exemple, on y expose le rôle parfois difficile du domestique de luxe, auquel on laisse parfois les coudées franches et d’autres fois pas. Sinon, des détails comme l’aspiration, le ravitaillement, le mode de vie, les blessures, le fonctionnement du peloton, le financement des équipes : tout cela est abordé de manière efficace et simple. On donne aux néophytes les outils pour apprécier le sport et le sortir de son carcan élitiste.

La technique

Oui, il y a des images exclusives. Oui, il y a des caméras embarquées et des séquences saisissantes. Mais ce sont les détails qui font la différence : la musique dramatique et ses basses galvanisantes, les sons ajoutés pour augmenter l’impression de vitesse des vélos ou du peloton, le montage nerveux qui témoigne du chaos de la course et l’amplifie. Il s’agit parfois de petits ajouts, mais ensemble, ils rendent l’expérience immersive et captivante. Comme un film d’action où chaque détail sonore et visuel ajoute à la tension sans qu’on s’en rende nécessairement compte.

La scénarisation

On applique ici la même recette qu’à Drive to Survive : plusieurs courbes narratives se croisent, s’enchevêtrent et se recoupent. Ellipses, retours dans le temps et autres procédés sont parfois nécessaires pour raconter une histoire sans vendre le punch de ce qui se déroulera une ou deux étapes plus tard. C’est magnifiquement réussi, si bien qu’on suit la chronologie de la course (ou de la course dans la course, tandis qu’on suit des échappés et les rivaux du classement général) en portant une attention particulière aux possibles divulgâcheurs (spoilers).

Le concept est le même que pour la F1, finalement. Le cyclisme est un sport d’attente, souvent ennuyeux, même lorsqu’on est fan. Cette série le rend haletant, sans temps mort, injectant sans cesse une dose d’adrénaline au scénario afin de garder l’attention de l’auditoire intacte.

Voilà la recette d’un succès bien reprise avec de nouveaux ingrédients, mais les mêmes techniques.

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