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Le blogue de David Desjardins

Tour de France: la nostalgie n’est plus ce qu’elle était

23-07-2025

Crédit: billy ceusters ASO

Au sommet du col du Soulor, tout le monde a une opinion sur le cyclisme actuel. Même les gendarmes.

Je suis en train de m’engueuler gentiment avec celui qui contrôle l’accès à la route tandis que les coureurs arrivent à une vitesse vertigineuse, dans une chaleur qui m’a donné des frissons tandis que je grimpais l’Aubisque pour arriver sur le Soulor par une autre voie.

      Bah, j’aimais ça le vélo quand j’étais gamin, geignait le représentant de la paix. Y’avait Voekler, y’avait Alaphilippe qui faisaient leur numéro, on laissait encore l’échappée gagner de temps à autres…, se lamentait le jeune flic. Ajoutant:  maintenant y’a les radios, tout est contrôlé, la course est cadenassée. 

      N’importe quoi…

      Ben quoi, c’est pas vrai ce que je dis?

Pas vraiment. D’abord, ce serait bien d’avoir des opinions à soi, pas celles de Marc Madiot et des autres vieux cons qui se limitent à dire que tout était mieux avant. Il en va du sport comme de la politique. Les gens répètent tout ce qu’ils entendent, peu importe la vérité, du moment que cela correspond à leur sentiment.

Le truc, jeune homme, lui ai-je exposé, c’est que tout le monde disait la même chose du temps de Voldemort*, de Wiggins, de Froome… La course était alors drôlement plus défensive qu’elle ne l’est désormais.

Pogačar est peut-être trop dominant pour votre goût, n’empêche que vous ne pouvez pas lui reprocher de grappiller les secondes puis d’éteindre la course. Sur les classiques, il attaque à 50, voire 80km de l’arrivée. Au Tour, il a passé les 5 dernières années à animer la course de ses folles attaques, certaines lui ayant sans doute coûté au moins un Tour sur les deux remportés par son rival danois.

Et pour ce qui concerne les échappées, z’avez déjà oublié le Tour de l’an dernier. Vous irez voir Unchained sur Netflix. C’est le premier épisode. Trois victoires de coureurs français, le plus souvent dans des échappées.

Tenez, hier, à Toulouse, jeune homme, deux danois se sont sauvés jusqu’à la ligne. Même le bullet train Mathieu van der Poel n’a pu les reprendre.

En fait, je vous soupçonne, comme beaucoup de Français, de trouver que l’internationalisation du sport vous prive de champions hexagonaux. C’est pas juste un truc cocorico : au Québec, on aime le Canadien pas mal plus qu’on aime le hockey.

Si Pogačar était français, ou qu’il faisait partie d’une équipe française, vous jubileriez. Mais depuis des décennies, se sont des Slovènes, des Danois, des Anglais qui se disputent les honneurs. Portés, tous, par le fric. En fait, le problème, c’est peut-être justement que vous n’aimez plus assez, collectivement, ce sport. Qu’il n’est pas assez lucratif en France. Donc l’argent n’y ruisselle plus.

Par exemple, cette série de Netflix sur le Tour, c’était sa dernière saison. On espérait un grand intérêt chez vous. Ça ne s’est pas produit. Ce n’est pas faute d’y avoir célébré votre pays et la culture cycliste locale, pourtant.

Et puis si vos équipes sont pratiquement toutes sur le respirateur, c’est peut-être parce que ce n’est pas un bon investissement pour les commanditaires. Mieux vaut mettre son fric sur le Tour, par exemple, qui est massivement suivi, que sur des équipes dont tout le monde se fiche le reste de l’année. Parce que c’est peut-être pas les Émirats, ici, mais ça ne manque pas de fric. Juste à voir ce qui se dépense sur la caravane publicitaire… Non, c’est l’intérêt des Français qui est simplement ailleurs. Et surtout tourné sur le foot. En plein Tour, l’Équipe fait sa couverture avec presque tout sauf du vélo. Du foot anglais, un jour de basket français d’une équipe américaine… Le Tour est en bandeau. Les Français ne sont pas au top parce qu’ils n’ont pas le fric, parce qu’ils sont entraînés par des dinosaures et tout cela, c’est en partie parce que les gens tiennent des discours comme le vôtre, qui tuent l’amour. 

Je venais de balancer tout ça au gendarme et il me regardait comme si j’étais débile.

« N’empêche, c’était mieux avant », qu’il me répond.

Il en va du vélo comme de la politique. Les gens ne veulent pas connaître la vérité. Ils veulent que leur sentiment soit validé, ils veulent avoir raison.

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