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Destinations, Hors-Québec

Espagne à vélo : Tortosa et les Terres de l’Èbre

12-12-2023

© Juan Sanchez Punzano

Mer ou montagne ? Dilemme déchirant quand il s’agit de choisir entre ces deux sources de plaisir. À Tortosa, au coeur des Terres de l’Èbre, dans la partie la plus méridionale de la Catalogne, en Espagne, le bonheur est d’avoir les deux à proximité. En plus, le cyclisme y est roi. Découverte d’un coin de paradis à explorer en toute saison.

La chaleur est toujours bien présente même si le soleil se couche. Ça tombe bien, car ici, à Tortosa, on soupe tard. C’est l’occasion tout indiquée de se promener dans la ville afin de se mettre en appétit. La plupart des villes espagnoles cultivent l’art du paseo (promenade en français). Elles offrent de larges trottoirs, des rues piétonnières ou des places où déambuler. À Tortosa, vos pas vous mèneront tout droit vers le fleuve Èbre. Totalisant près de 1000 km, il traverse d’ouest en est une bonne partie de la péninsule ibérique avant de se jeter dans la Méditerranée. La ville est située à une trentaine de kilomètres de la mer et autant de la montagne ; c’est un camp de base chargé d’histoire, parfait pour sillonner à vélo la région. La diversité des parcours permet de varier les plaisirs.

© Jacques Sennechael

Prendre de la hauteur sur le mont Caro

Ça commence en force : le petit peloton de journalistes venant d’un peu partout que nous formons s’attaque au mont Caro. Avec ses 1445 m, le El Caro, comme on l’appelle ici familièrement, est le point culminant de la province de Tarragone. Il ne se contente pas d’être connu localement ; sa beauté et sa difficulté le classent dans la liste « à faire » des cyclistes, d’autant plus que c’est un des points forts du Tour de Catalogne.

En moulinant tranquillement, nous quittons le SB Hotels & Bike, un hébergement qui accueille volontiers les cyclistes. Certes, la température de 25 degrés facilite l’échauffement. Si ce n’était pas le cas, les 3-4 % de dénivelé des dix premiers kilomètres contribueraient à réchauffer les muscles avant de passer aux choses sérieuses. Nous sommes dans le massif du parc naturel des Ports. Le paysage est typiquement méditerranéen. La roche calcaire érodée sculpte des plis, des failles et des ravins aux formes alambiquées. En haut d’un pic, un bouquetin aux longues cornes arquées observe les cyclistes en action. Celui-ci est en pierre, permettant d’immortaliser l’animal le plus important d’Espagne dans son refuge. La douzaine de kilomètres qui grimpe jusqu’au sommet laisse largement le temps d’admirer le paysage. Avec un premier passage à 9 % et quelques autres à 10 %, la route en lacet s’impose.

Une dernière partie au relief plus modéré permet de reprendre notre souffle avant l’ascension finale et ses faces de singe à 17 %. Au sommet, la vue est spectaculaire. Entre le calcaire des pics rocheux et la végétation diversifiée (plus de 1200 espèces), les couleurs varient. Un peu plus loin, on devine la Méditerranée même si elle est cachée par la brume. Il paraît que par temps clair on arrive à voir l’île de Majorque !

© Jacques Sennechael

Le delta de l’Èbre

Si le sommet du El Caro se mérite, le delta de l’Èbre demande beaucoup moins d’efforts. L’endroit où le fleuve Èbre rencontre la mer occupe 320 km2, un mélange complexe de rivières, de mer, de lagunes et de quelques îles fluviales. Les Terres de l’Èbre ont été déclarées réserve de la biosphère par l’UNESCO. Outre les rizières qui ont trouvé ici un terrain adéquat, le delta accueille une grande diversité d’organismes : oiseaux, poissons, reptiles, amphibiens, invertébrés.

Pour Tortosa, il faut savoir que ce fleuve est le nerf de la guerre. Au sens propre : en 1938, pendant la guerre civile espagnole, Franco a bombardé la ville parce que le cours d’eau représentait un lieu névralgique. Les citoyens de la ville ne savent d’ailleurs pas trop quoi faire de la sculpture érigée au milieu du fleuve dans les années 1960 par Franco, en souvenir de sa victoire à la bataille de l’Èbre. Ernest Hemingway a été l’un des derniers journalistes à quitter la ville bombardée ; son article « Bombing of Tortosa » est l’un des grands textes de cette guerre.

De nombreux vestiges de cette période cruciale pour l’Espagne existent encore, notamment un abri antiaérien qui a servi pendant les bombardements. Bien avant la bataille de l’Èbre, le fleuve était une voie privilégiée pour le transport des marchandises, de la mer jusqu’à Zaragosa (ou le contraire). Vers 1930, les bateaux à vapeur ont remplacé les traditionnels llaguts (embarcations) sur le camino de sirga (chemin de halage). Ils étaient remplis à ras bord de vin, d’huile, de riz, et accueillaient même quelques passagers.

Nous pédalons sur la voie verte qui longe le fleuve pendant un moment. L’eau est ici domptée, dirigée, organisée pour enrichir la terre de ses sédiments. Elle coule vigoureusement dans des canaux, humectant la terre là et quand il faut. Ce n’est pas pour rien que 22 000 hectares sont consacrés à la culture du riz. En juin, les rizières colorent le paysage d’un vert tendre. Petites routes ou chemins mènent à des lagunes et à des marais où des colonies de flamants roses picorent, les pattes dans l’eau. Le parcours est plat et parfaitement adapté à une sortie familiale.

Elle peut se terminer, comme nous le faisons, par une dégustation de moules à la ferme marine Musclarium, à Sant Carles de la Ràpita. Celle-ci étant installée sur pilotis, on y a accès par un petit bateau. Tortosa et le delta de l’Èbre offrent tout ce qu’il faut pour satisfaire des cyclistes avides de nature et d’histoire. Les familles se sentiront aussi les bienvenues tant l’offre des activités est généreuse et l’endroit encore peu fréquenté. Ce secret est maintenant partagé.

© Jacques Sennechael


Repères

À faire entre deux coups de pédale

Naviguer sur l’Èbre à bord du traditionnel llagut catalan Lo Sirgador. Non seulement vous verrez la ville d’un autre oeil, mais vous longerez l’île sauvage de la Chiquina où de fiers taureaux se promènent librement.

Sillonner les rues de Tortosa pour découvrir ses 2000 ans d’histoire. Le passage du christianisme, de l’islamisme et du judaïsme a laissé un héritage. Les Francs, les Goths, les Maures, les Français et les Nationalistes qui ont attaqué la ville ont eux aussi marqué la ville. Ne manquez pas d’entrer dans la cathédrale Santa Maria ; le bâtiment est gothique, mais la façade, construite plus tard, est baroque. Quant au château de la Zuda et à la tour de Túbal, ils dominent et protègent la ville.

Déguster des moules dans la baie des Alfacs. L’heureux mélange d’eau douce et d’eau salée du delta apporte de bons nutriments aux mollusques, qu’on peut manger sur l’eau, à la ferme marine le Musclarium, à Sant Carles de la Ràpita. Visiter la Cathédrale du vin, à El Pinell de Brai. Cette coopérative vinicole offre des vins locaux dans un bâtiment à l’architecture étonnante. S’y rendre pour le plaisir des yeux et des papilles.

Dormir l’esprit tranquille au SB Hotels & Bike. Vous pourrez y soigner votre vélo en cas de pépin mécanique, et celui-ci sera lavé et surveillé au retour de votre sortie. Location possible d’excellents vélos Orbea. De plus, l’hôtel propose une trentaine de circuits pour tous les calibres, et ce, autant sur le bitume que dans les sentiers, sans oublier les parcours adaptés aux familles

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