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La Vendée à vélo

26-07-2012

En 2011, il manquait quelques kilomètres pour boucler le tour de Vendée par les pistes cyclables. Il est prévu de combler le manque cette saison, ce qui totalisera pas moins de 1000 km et près de 70 itinéraires. La Vendée a reçu avec brio les coureurs du Tour de France en 2011, dès le départ et pour trois jours. Le Tour serait présent sur les routes de mes racines? Je me devais d’être là. Avant de suivre les péripéties de la Grande Boucle, j’ai donc décidé de jouer les touristes cyclistes et de découvrir la Vendée et ses attraits sur deux roues. Pour qu’un plaisir ne vienne jamais seul, j’ai invité Jean Soulard, chef du Château Frontenac et lui aussi un local des étapes vendéennes. Le chef Soulard a, enfant et ado, dans le village de La Gaubretière, trempé ses morceaux de pain fait par une de ses grands-mères dans les sauces concoctées par son autre grand-mère. Il ajoutera un volet culinaire à nos coups de pédale.

217 km de littoral
La Vendée offre 217 km de plages de sable, de côtes rocheuses et de pinèdes donnant vue sur l’Atlantique. Une fabuleuse manière de commencer à pédaler la Vendée. Si certaines villes traversées sont de hauts lieux du tourisme balnéaire, avec la surpopulation touristique que cela engendre, d’autres endroits sont plus paisibles même en haute saison. De toute façon, le vélo est sans conteste le moyen de transport idéal pour circuler sur la côte. On gare sa voiture en arrivant et on la reprend en partant ; pendant le séjour, on se déplace à vélo, car le bord de mer est pourvu de toutes les infrastructures nécessaires pour faciliter la vie : pistes cyclables vers les plages et les commerces, stationnement pour les vélos, aires de pique-nique, location de vélos…

Nous établissons notre camp de base à l’hôtel Domaine le Martinet, à Bouin, village situé à quelques kilomètres de l’océan, au nord-ouest du département. L’endroit est calme même en haute saison, l’hébergement et les restaurants sont de qualité. Que demander de plus? La location des vélos? Elle est offerte par l’hôtel choisi. À propos de la monture : il est pertinent de choisir un vélo polyvalent quand on veut circuler sur les parcours du littoral. Si certaines pistes cyclables ou routes tranquilles empruntées déroulent un bitume de qualité, il n’est pas rare de rencontrer des sentiers cyclables sablonneux où hybrides ou vélos de montagne conviennent mieux. Il est aussi envisageable d’utiliser un vélo de cyclocross.

Dès nos premiers coups de pédale, en sortant de Bouin en direction du port des Brochets, il suffit de fermer les yeux et d’inspirer profondément pour deviner que nous sommes à proximité de la mer. L’air s’est enrichi des effluves des algues, des vagues et du sable mouillé. On peut presque dire que nous sommes les roues dans l’eau, puisque nous sommes sur une terre qui a été gagnée sur la mer.
De chaque côté de l’étroite route, des marais séparent les champs. Un vieux bateau de bois tout décati termine sa vie au sec sur le gazon. Au port des Brochets, les quais sont bordés par les maisons des pêcheurs. L’écluse assure la circulation de l’eau. Des cabanes surplombent les marais avec de grands carrelets qui attendent en séchant au vent le retour de la marée. Jusqu’au port des Champs, pas d’obstacles majeurs ni de grand prix de la montagne. La seule chose qui nous ralentit est la force du vent quand il décide de souffler contre nous. Dans les bassins, les huîtres s’affinent paisiblement en attendant d’être dégustées nature, arrosées de quelques gouttes de citron.

En traversant les polders du Dain, nous roulons au sec tout en étant plus bas que le niveau de la mer! Nous arrivons au passage du Gois, une route soumise aux marées qui lie l’île de Noirmoutier au continent. Cette chaussée submersible n’est accessible qu’une heure et demie avant et après la basse mer. Son nom vient du terme goiser, «marcher en mouillant ses sabots». Judicieux choix, puisque seules les balises, dotées de plateformes surélevées appelées cages, permettent aux imprudents de rester au sec en attendant la prochaine basse mer. Ce chemin recouvert de pavés dévoile un paysage étonnant, comme si la route s’ouvrait sur la mer l’espace de quelques heures. Histoire de varier les plaisirs, nous décidons de faire l’aller-retour en courant (deux fois 4,2 km), l’horaire des marées nous en donnant tout juste le temps. C’est en traversant au pas de course que nous apprendrons que tous les ans se déroulent les Foulées du Gois, épreuve de vitesse dont le départ est donné à la marée montante. Les coureurs finissent les pieds dans l’eau et, si le coefficient de marée haute est plus important, ils auront de l’eau jusqu’à la taille. La course a lieu justement le lendemain, au coucher du soleil. Nous aurons droit à un fabuleux spectacle ! Une semaine après, les coureurs du Tour de France visiteront ce même passage du Gois, le départ officiel de la Grande Boucle 2011 se faisant tout juste à la limite des derniers pavés.

Noirmoutier la belle  
Près d’une vingtaine de kilomètres de long pour une largeur variant de 500 m à 12 km, l’île de Noirmoutier cultive sa marginalité, ne serait-ce que par ces mimosas qui y poussent en février. L’île se déguste remarquablement bien à vélo entre dunes, marais salants et forêts de chênes verts, le tout sur près d’une centaine de voies cyclables en piste ou en chaussée partagée. L’été, on y dorlote les touristes (60% des maisons de l’île sont des résidences secondaires, 10 000 habitants l’hiver, 100 000 l’été!), le reste de l’année on y fait grossir les huîtres et la bonnotte (la pomme de terre locale, nourrie aux algues et autres saveurs marines), on y récolte le sel et la salicorne, sans oublier qu’on y pêche.

Chacune des municipalités de l’île a conservé son caractère propre, souvent lié à l’activité de ses habitants. À L’Épine, les saulniers récoltent le sel marin – en passant, au nord de la Loire, on les appelle les paludiers. Le port de l’Herbaudière est connu pour ses pêcheurs, tandis qu’à La Guérinière on travaille l’huître. À Barbâtre sont établis les marins de commerce alors qu’au Vieil, on cultive la terre. Quant à Noirmoutier-en-l’Île, elle est habitée par les notables.

La journée sera courte pour explorer à vélo tous les recoins de l’île – pas que le kilométrage soit élevé, c’est le nombre d’arrêts à faire en
cours de route qui l’est ! Amorcez la journée en admirant le lever du soleil à la plage des Dames, un endroit unique avec son estacade et ses cabines de bain. Voyez le saulnier entretenir ses bassins – les œillets où le sel est plus concentré – à l’aide de son grand râteau (le rouable) sous un soleil éclatant. Pensez à faire le plein d’iode en dégustant une douzaine d’huîtres à peine sorties du bassin (la fine claire) où elles s’affinent. N’oubliez pas non plus de vous baigner à la place du Mardi-Gras, au Vieil, et d’imaginer les vacances passées au bord de l’eau dans les minuscules maisons qui ont directement accès à la plage. Ici, les roses trémières poussent comme de la mauvaise herbe, comme la bonnotte. À Noirmoutier-en-l’Île, profitez du jour du marché sans manquer de jeter un coup d’œil au château du xiie siècle et à l’église du iie. Enfin, passage obligé au restaurant La Marine, face au port de l’Herbaudière, restaurant dirigé par le chef Alexandre Couillon, et étoilé Michelin. (Voir le texte de Jean Soulard, «La Vendée gourmande».)

Saveurs littorales
Une journée de vélo qui commence par une dégustation, la chose est plutôt rare. Cela dit, il ne faut manquer sous aucun prétexte la Maison du terroir à Brem-sur-Mer, à une petite quinzaine de kilomètres au nord des Sables-d’Olonne. Une quarantaine d’agriculteurs et de producteurs de la région y proposent leurs produits. C’est l’occasion de les rencontrer, mais aussi de déguster le fruit de leur travail. L’endroit est notre point de départ de l’étape du jour, dont le but est de rejoindre notre camp de base à Bouin en suivant la côte vers le nord, soit environ 70 km.

Premier arrêt à Brétignolles-sur-Mer pour regarder les surfeurs. Juste après une zone de dunes, c’est l’endroit où s’exercer sur la côte. Avant Saint-Gilles-Croix-de-Vie, nous traversons une forêt. La cohabitation piéton-cycliste se passe bien, chacun passant de son bord. Ensuite, place à une côte plus sauvage ornée d’une corniche, de rochers. Si la marée est haute et que la houle est forte, prenez votre pause en face du rocher Le Trou du diable pour voir à chaque vague l’eau former un véritable geyser. S’il fait chaud, posez votre vélo et baignez-vous dans les criques en face des Cinq Pineaux, une série de rochers isolés à quelques mètres de la grève.

Retardez votre arrivée à Saint-Jean-de-Monts et ses plages aux allures de promenade des Anglais pour profiter de la quiétude de la forêt domaniale des Pays de Monts. La piste cyclable sablonneuse circule entre les pins parasols et les chênes verts. Vous retrouverez la sérénité de cette forêt après Saint-Jean-de-Monts, puis vous rejoindrez le camp de base de Bouin.

En parcourant à peine un tiers du littoral vendéen, le cycliste a un bon aperçu du caractère des différentes villes qui bordent la mer. Entre Les Sables-d’Olonne la travailleuse, Brétignolles la campagnarde, Saint-Gilles la pêcheuse et Saint-Jean la touriste, l’Atlantique fait le lien entre ses belles océanes. Tout le littoral vendéen se prête fort bien au tourisme familial, une découverte qui s’avérera passablement plus tranquille si elle est faite à vélo.

Entre campagne et bocage
Philippe Gilbert a enfilé le premier maillot jaune du Tour de France 2011 en passant la ligne au mont des Alouettes. Quand je pense que je considérais déjà dans ma jeunesse ces 232 m d’altitude comme un sommet d’anthologie… C’est dommage que le coureur belge n’ait pas pris le temps de regarder le paysage du haut bocage. Mais il n’était pas là pour ça, il a donc pris la nationale 160 le nez dans le guidon. Il a manqué les magnifiques routes de campagne qui tissent une véritable toile de trajets potentiels. Certes, ces routes ne sont pas larges, mais elles sont surtout très peu fréquentées et bordées de calvaires, de champs de blé ou de maïs et de pâturages, elles comportent un revêtement plutôt rugueux mais néanmoins confortable. La Gaubretière, Saint-Martin-des-Tilleuls, Saint-Aubin-des-Ormeaux, le parcours est vallonné à souhait. Ici, ce ne sont pas toujours des fils barbelés qui délimitent les champs, mais plutôt des haies fournies. Non seulement celles-ci protègent-elles du vent et retiennent-elles la terre, mais elles donnent aussi du volume et du relief au paysage.

À Saint-Aubin-des-Ormeaux s’épanche la Sèvre Nantaise, rivière qui est le dernier affluent de la Loire avant que ce grand fleuve ne rejoigne l’océan Atlantique. En attendant, elle coule plutôt paresseusement, parsemée de rochers dans le relief vallonné du haut bocage. L’itinéraire emprunte quelques routes étroites, mais aussi des chemins ravinés entourés de futaies. Il est facile de suivre le cours d’eau jusqu’à Mortagne-sur-Sèvre, puis Saint-Laurent-sur-Sèvre. Même si nous sommes à la fin de juin, au début de juillet, peu de cyclistes empruntent les sentiers. L’endroit est calme en plus d’être à l’ombre de grands arbres. Comme il a plu la veille, c’est la journée des senteurs, odeurs d’herbe mouillée, de rivière languissante et de forêts ombrageuses.

Demain, c’en est fini de la sérénité. Les coureurs du Tour s’élanceront de l’île de Noirmoutier jusqu’aux Herbiers avant de monter mon mont des Alouettes. Dans le coin, on aime le vélo, et ça va s’entendre sur le bord des routes.

La Vendée gourmande de Jean Soulard
J’ai souvent présenté mon village de La Gaubretière en disant qu’il y avait plus de canards que d’habitants. C’est une image, pas tout à fait fausse, avec laquelle j’essayais d’exprimer que c’est petit et c’est bon. La vie m’a emporté ailleurs. Un retour aux sources de trois jours lors du passage du Tour de France l’an dernier m’a permis de parcourir à nouveau ma région d’origine, et cette fois-ci à vélo. J’ai pu constater après quelques décennies qu’elle n’avait pas beaucoup changé ; c’est un peu plus grand, toujours très bon, et extraordinairement sympathique. Allier gastronomie et tourisme est chose très facile en Vendée. Laissez-vous porter.

La bonnotte
Ambassadrice universelle de l’île de Noirmoutier, cette pomme de terre grelot s’est implantée entre les deux grandes guerres. Sa production a cependant été vite délaissée alors que la mécanisation débutait. Petite, fragile, la bonnotte réclame un ramassage à la main, donc peu rentable, et sa production dépasse difficilement la centaine de tonnes. Cultivée dans une terre très sablonneuse, enrichie au goémon, elle est récoltée avant maturité, à 90 jours. La bonnotte est généralement la première de l’année qui soit commercialisée, au début de mai, et est parfois vendue aux enchères – chez Drouot, s’il vous plaît – à des prix prohibitifs de l’ordre de 500$ le kilo.

Le sel
Fleur de sel, gros sel, sel fin sont des produits naturels qui doivent leur existence à la transmission des savoirs, issue d’une tradition millénaire. La culture de l’« or blanc » remonte au ve siècle, et les artisans du sel doivent composer avec une nature aussi fantaisiste que bienveillante, une délicate alchimie entre la terre et la mer, la pluie, le vent et le soleil, tantôt cléments, tantôt rudes. Tout en protégeant l’environnement, les cent saulniers de la coopérative garantissent un sel authentique de grande qualité, et une production d’environ 12 000 tonnes sort chaque année de ces marais salants.

La brioche de Vendée
Dans sa boulangerie, la brioche était le rayon de mon père. Tous les samedis, il en cuisait de nombreuses, dont une très grosse qui avait la forme ovale d’un circuit de course américain et dont le moule devait faire 2 m de long. La fabrication de la brioche vendéenne est ancestrale. Cette pâtisserie tire ses origines d’un croisement des recettes du gâteau de la mariée (pour la texture et le tressage) et de la galette de Pâques (notamment par l’utilisation des œufs). Elle prit ses lettres de noblesse lorsque, après la Seconde Guerre mondiale, dans une action de solidarité pour venir en aide aux prisonniers de guerre, l’association des Vendéens envoya à Paris des spécialités vendéennes, dont la fameuse brioche. On fit alors une distinction entre les brioches parisienne et vendéenne.

La mogette
La mogette de Vendée est un haricot blanc de type lingot, et son grain est de forme allongée. Sa production traditionnelle s’est toujours maintenue depuis le xvie siècle. Mes souvenirs de la mogette sont ancrés au plus profond de mon enfance. Le soir où ma mère, trop affairée à l’auberge, n’avait pas eu le temps de faire le souper, nous mangions des grillées de mogette. Les tranches de pain au levain de mon père, boulanger, étaient donc grillées, puis beurrées généreusement, et la mogette froide était écrasée sur le pain. Quel souvenir ! Oui, je sais, ça peut paraître étrange gastronomiquement parlant. Mais les souvenirs d’enfance gustatifs ont une place à part. Voici une recette pour apprêter la mogette comme un vrai Vendéen.

Haricots blancs comme les cuisinait ma grand-mère

450 g de haricots blancs
30 ml d’huile d’olive
1 oignon, émincé
125 ml de vin blanc
3 tomates, coupées en dés
1 gousse d’ail
150 g de lard de poitrine non salé, coupé en lardons
poivre et sel

Dans un bol, faire tremper les haricots dans l’eau durant 8 h ou toute une nuit. Égoutter.
Dans une cocotte, faire revenir l’oignon dans l’huile pendant 2 min.
Ajouter le vin blanc, les tomates, l’ail, les lardons, et laisser frémir 5 min.
Ajouter les haricots et recouvrir de suffisamment d’eau.
Poivrer. Couvrir et laisser mijoter de 1 h à 1 h 15. Rajouter de l’eau au besoin.
Saler à la fin de la cuisson et enlever les haricots du feu lorsqu’ils sont tendres.

Les vins des fiefs
On ne peut parler d’une région de France sans mentionner ses vins. La Vendée ne fait pas exception. Au sud, au cœur d’une des plus petites superficies vinicoles de France, près de 50 viticulteurs et négociants cultivent la richesse du fiefs-vendéens. Elles se regroupent en quatre entités bien distinctes : les vins de Mareuil, de Brem, de Vix et de Pissotte. La douceur océane et l’ensoleillement supérieur à la moyenne nationale font de ces blancs, rosés et rouges des vins légers, à boire souvent jeunes.

Le restaurant La Marine
Situé sur l’île de Noirmoutier face au port de l’Herbaudière et étoilé Michelin, La Marine est dirigé par le chef Alexandre Couillon et Céline Couillon. Détenteur du titre de Grand Chef de demain de 2008, Alexandre Couillon propose une cuisine créative, voire émotive, où les produits locaux sont déclinés de façon originale. C’est de cette façon que nous avons dégusté un bouillon de crustacés infusé à la verveine. Il fait aussi l’éloge de la bonnotte en glace, en chips et en crème. Ce lieu est un incontournable dans l’Île.

Pour cuisiner comme un vrai Vendéen
Le Grand Soulard de la cuisine, de Jean Soulard, Les Éditions La Presse.

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