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Le blogue de David Desjardins

Vivre sa ville

18-11-2022

Photo par Nomadic Julien, sur Unsplash.

C’est beau à voir, que je me suis dit.

J’étais au coin de St-Denis et du Roy. Je m’en allais travailler sur mon ordi au café cycliste Le Club avant de me rendre à un rendez-vous au centre-ville. Il y avait des gens à vélo à la pelle qui traversaient l’intersection devant moi. Ils déferlaient de tous les bords. Ils et elles étaient de tous les genres, bien qu’appartenant en majorité au clan des adeptes de l’utilitaire.

Ceux-là sont faciles à repérer : vélo très ordinaire, souvent muni d’un banc de bébé, sinon d’un porte-bagage. Leurs pilotes sont habillés comme s’ils allaient prendre une marche avec un casque. Ils portent souvent un sac à dos.

Du ben beau monde qui allait travailler et/ou déposer les enfants à la garderie en vélo alors que l’été ne voulait pas finir, conférant à cette fin d’octobre une impression à la fois belle et lugubre. Cette lumière jaune d’automne et le couvert de feuilles mortes appartiennent à des mercures plus timides.

Je me suis souvenu de ce quartier quand je l’habitais, il y a maintenant 28 ans. Les vélos y étaient rares. Même dans le parc Lafontaine, on n’en croisait peu. Ils sont désormais partout. C’est magnifique. Et ce n’est pas qu’une affaire cycliste. C’est quelque chose comme la vie urbaine qui coule dans les veines des villes, sans carcasse d’acier.

REV et autres fantasmes devenus réels

On construit des autoroutes pour deux roues et pédales. Les citoyens hurlent d’abord d’horreur puis se ressaisissent quand les statistiques brandies en amont se confirment : les cyclistes sont de meilleurs consommateurs que les automobilistes. Moins y’a d’auto, plus y’a de place pour vivre, pour s’arrêter, pour acheter.

Comme j’étais inhabituellement venu à Montréal en voiture, cette fois, j’ai pu constater l’ampleur du cauchemar que représentent les déplacements automobiles dans la métropole. Même s’il reste encore du monde pour pester comme le REV et son nouveau développement annoncé, leurs voix ne portent plus comme avant.

La force du changement est en train de venir à bout de l’inertie du statu quo.

Même chose à Québec, où je vis, et où le maire annonçait récemment l’ouverture de routes cyclables à l’année. Les changements s’opèrent à mesure que l’on élit aussi des individus avec une vision d’avenir et qui préfèrent l’évolution à la réélection.

Du monde qui roule, c’est encore mieux. C’est le cas de Valérie Plante et Bruno Marchand, même si leurs pratiques respectives diffèrent considérablement.

On parle beaucoup de tunnel, de troisième lien, de la folie que constitue désormais le trafic auto dans les grandes villes. C’est bien. Et il faut le vivre pour comprendre à quoi ressemble le quotidien des gens qui ont accepté de vivre cette réalité, ou qui sont simplement chassés des centre-villes et des banlieues de proximité, devenues financièrement inaccessibles.

Pris sur la Métropolitaine, à mon retour, ne me déplaçant que de 10km en une heure, je m’étais engourdi l’indignation au bout d’une trentaine de minutes. Peu habitué au trafic, d’abord fortement irrité, je me suis rendu compte -en quelques minutes à peine- qu’on s’habitue à tout.

Imaginez si, plutôt que d’accepter de vivre le pire en perpétuant tout ce qui va mal, on se donnait les moyens de vivre mieux. Je gage qu’on s’habituerait aussi. Mais plutôt que de se sentir engourdi, on se sentirait plus vivant.

Je repense aux gens à vélo coin St-Denis et du Roy. Je vous mentirais en vous disant qu’ils souriaient toutes et tous. C’est quand même pas le merveilleux monde de Disney, le vélo urbain. Mais ils avaient l’air bien. Allumés. Ils semblaient engagés dans la vie. Si vous avez déjà enfourché une bicyclette au petit matin pour aller faire des courses, vous savez de quoi je parle.

C’est un peu comme vivre sa ville plutôt que de la subir.

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