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Reportage

Le dynamisme d’une tradition

23-05-2019
tradition cyclisme quebec

Le Québec est un des lieux en Amérique du Nord où la tradition du cyclisme est le plus solidement implantée. Mais on semble parfois oublier à quel point les racines sont profondes.

En 1974, devant les principaux bâtiments de l’Université de Montréal, le grand Eddy Merckx remporte le titre de champion du monde sur route. Derrière lui, Raymond Poulidor, l’éternel second. De plus en plus nombreux au Québec, les amateurs de cyclisme exultent.

Avec ces Championnats du monde, et plus tard avec les Olympiques, le circuit du mont Royal gagne soudain une renommée internationale. Il est en fait utilisé pour les courses cyclistes depuis 1958, année de l’inauguration de la montée Camillien-Houde. En 1976, aux Jeux olympiques de Montréal, le circuit accueille les meilleurs amateurs du monde. Parmi eux, chez les Canadiens, on trouve le jeune Pierre Harvey, 19 ans. L’année précédente, au cours de sa deuxième année de compétition à vélo, celui-ci s’était offert les Championnats québécois et la victoire du Tour de l’Abitibi.

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Les Tours

Descente Mont-Royal vintage bike montreal

Né en 1969, le Tour de l’Abitibi constitue une véritable institution du cyclisme québécois. Son fondateur, le journaliste sportif Léandre Normand, est un passionné de hockey doublé d’un cycliste fervent. Il a été par la suite président de la Fédération cycliste du Québec.

Le Tour de l’Abitibi devient une classique du circuit international pour les coureurs de catégorie junior. On ne compte plus les jeunes espoirs qui y prennent part. En 1976, le jeune Steve Bauer, monté sur un vélo français Peugeot, fait bonne figure au Tour de l’Abitibi. En 1984, le même Bauer manquera de très peu l’accession à la plus haute marche du podium olympique à Los Angeles, après avoir été aidé en course par… Pierre Harvey.

Depuis 2008, le Tour de l’Abitibi constitue une épreuve de qualification pour les Championnats du monde junior sur route de l’Union cycliste internationale.

Le Breton Yvon Guillou, arrivé au Québec dans les années d’après-guerre, avait en tête de lancer une grande course à étapes dans l’esprit du Tour de France. Il n’y avait en fait rien eu de tel depuis la grande course Transcontinentale d’août 1933. Grâce au dynamisme de cet organisateur, le cyclisme sur route connaît un nouvel élan.

Yvon Guillou donne le coup d’envoi du Tour du Saint-Laurent en 1954. L’épreuve est présentée au public comme une immense fête populaire itinérante. Différentes équipes nationales y sont présentes, dont celles de France, de Pologne, des Pays-Bas, de Suisse, d’Italie, de Yougoslavie et de Tunisie. Les coureurs s’affrontent sur un parcours de plus de 2000 km. En 1964, l’équipe canadienne est composée des Québécois Jean Garon, Jacques Lepage et Aurelio Battelio ainsi que de l’Ontarien Jos Jones. Un coureur italien, Giuseppe Marinoni, s’y fait remarquer, comme dans plusieurs autres courses. On doit au cinéaste Jean-Claude Labrecque, de l’ONF, le magnifique film 60 cycles, qui rend compte de ce que fut le Tour du Saint-Laurent.

D’autres compétitions

champ. du monde 1974 merckx

Eddy Merckx
Photo: Pierre Hamel

Parmi les compétitions importantes, mentionnons également les courses intercités. La plus célèbre est sans conteste la classique Québec-Montréal, courue annuellement depuis 1931, mais dont la promotion a souvent laissé à désirer.

À compter de 1988, le circuit du mont Royal, utilisé pour nombre de compétitions cyclistes, accueille à nouveau la fine fleur du peloton professionnel. Lors de première édition du Grand Prix des Amériques, c’est le Canadien Steve Bauer qui l’emporte. De 1988 à 2009, 12 Coupes du monde féminines se tiennent sur ce même parcours. L’année 2010 marque le retour du cyclisme international avec les Grands Prix cyclistes de Montréal et de Québec, lesquels attirent des dizaines de milliers de spectateurs.

Depuis la fin du XXe siècle, une nouvelle génération de Québécois a su se tailler une place chez les professionnels. Gianni Vignaduzzi court ainsi pour une équipe italienne dans les années 1990. Depuis, les rangs professionnels comptent des coureurs québécois, comme David Veilleux, Guillaume Boivin ou Antoine Duchesne. Cette nouvelle génération de compétiteurs d’élite engendrera-t-elle une descendance tout aussi vigoureuse ?

Dans les vélodromes

velodrome montreal quebec

Cyclistes à l’entraînement au vélodrome olympique

On oublie trop facilement que l’histoire du vélo de compétition au Québec tient d’abord à une véritable passion du public pour les courses sur piste. Montréal a compté plusieurs vélodromes au fil de son histoire.

En 1899, au vélodrome de Verdun, se déroulent les épreuves des Championnats du monde. Tout en bois, la nouvelle installation accueille des compétiteurs des ÉtatsUnis, de l’Écosse, de la France, de l’Australie, de l’Afrique du Sud, du Canada et de l’Angleterre.

La même année, Terrebonne inaugure elle aussi un vélodrome. Afin d’en apprécier la rapidité, elle fait venir de Montréal le réputé cycliste canadien-français Curtis Boisvert. Comme cycliste professionnel, ce dernier s’est construit un beau palmarès. Aux États-Unis, où il est connu sous le nom de Greenwood, il bat notamment Tom Cooper, l’étoile du Detroit Athletic Club. Curtis Boisvert accumule les victoires jusqu’à ce que le cyclisme, au début du XXe siècle, cesse d’être un sport aussi populaire en raison de la progression rapide de l’automobile.

En 1911, le président du Montreal Bicycle Club, qui est aussi président du club de raquetteurs Montreal Snowshoe, affirme qu’il a l’intention de relancer le cyclisme par la présentation d’épreuves lors des parties de crosse, une discipline alors très en vogue. Mais le regain de vie se produit lentement. En 1913, le club cycliste Apollo organise quelques courses. Un promoteur, Henri Hubert, en présente également au parc Delorimier, sur la piste des chevaux trotteurs; au moins, on ne fait plus courir les chevaux contre les cyclistes, comme ce fut parfois le cas à la fin du XIXe siècle. Il faudra attendre Louis Quilicot, en 1915, pour que se mettent en place de nouvelles structures favorables au renouvellement de ce sport. «À l’époque, affirme Louis Quilicot, les coureurs n’étaient pas nombreux; peut-être étions-nous une trentaine. »

En 1929, un vélodrome est construit au parc Jarry, à Montréal. Ses gradins sont vite bien remplis.

Plus populaire que le hockey

6 jours Montréal 1934_m.Jolicoeur

Photo: m.Jolicoeur

Au Forum de Montréal, dans la période de l’entre-deux-guerres, les parties de hockey n’attirent pas grand-monde. Maurice Richard n’est pas encore sur la patinoire. Ce sont plutôt les combats de lutte et le cyclisme qui font vibrer l’amphithéâtre.

À compter de 1929, on présente très régulièrement des courses sur piste à Montréal comme dans la plupart des grandes villes nord-américaines. À Detroit, New York et Chicago, les journaux locaux présentent des photos d’Henri Lepage, de Pierre Gachon et de Jules Audy.

Cette notoriété des coureurs cyclistes trouve son miroir dans la publicité. Des pistards servent à la promotion de plusieurs produits de consommation, dont les marques de bière.

Le vélo ne redeviendra pas aussi populaire à la fin du conflit mondial. Il faut tout de même noter l’édification d’un vélodrome à Shawinigan en 1947-1948, des épreuves internationales sur piste à Verdun en 1949, puis la construction d’une piste à Québec, au parc Victoria, dans les années suivantes, ainsi que celle, en 1955, à Montréal, du Vélodrome Métropolitain.

Au centre Paul-Sauvé, dans les années 1960, les courses de six jours raniment une nouvelle ferveur envers le cyclisme. De grandes vedettes prennent part à ces courses, dont les Belges Patrick Sercu et Emile Severeyns. Pourtant peu passionné par l’activité physique, le tribun Pierre Bourgault dira alors qu’il n’existe pas de plus beau sport. Le cyclisme sur piste connaîtra encore quelques belles années grâce au vélodrome olympique. Mais celui-ci, surdimensionné pour les besoins locaux, finira par changer de vocation et devenir le Biodôme. La piste tombera sous le pic des démolisseurs. Depuis, il ne reste plus au Québec qu’une piste extérieure à Bromont. Rien de suffisant pour assurer le plein développement de la discipline.

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