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Y a-t-il toujours eu un style vestimentaire propre au vélo? Êtes-vous capable de vous imaginer monter les pentes ou avaler les kilomètres dans une combinaison… en laine ?
La bicyclette arriva sur le marché québécois à la fin des années 1860, un premier modèle ayant été vendu dans la ville de Québec en 1868. L’intérêt fut tel que des écoles dites de vélocipédie furent ouvertes, au coût de 40¢ de l’heure. Les premières courses commencèrent à s’organiser à Québec, mais également à Lévis et à Montréal.
Comme ce sport se démocratisa assez rapidement, les femmes voulurent elles aussi le pratiquer. À la fin du XIXe siècle, toutefois, les dames portaient des vêtements volumineux qui limitaient considérablement leurs mouvements sur un vélo. C’est ainsi que la question vestimentaire fit son apparition : par le débat sur la possibilité des femmes de faire de la bicyclette. Or, l’arrivée de la bicyclette est étroitement liée au début de leur émancipation, car cette activité peu coûteuse leur permettait de sortir de leur confinement au foyer. Cependant, pédaler exigeait qu’elles troquent les jupes et jupons contre un pantalon…
H. S. MUSSEN ET MME CAMPBELL AVEC DES BICYCLETTES, MONTRÉAL, 1897 | WM. NOTMAN & SON © MUSÉE McCORD, II-119827. 1
Avant les années 1950, peu de choix de vêtements et d’accessoires
La mode cycliste évolua peu avant les années 1950. Et pourtant, dès que la bicyclette devint plus répandue, elle passa rapidement d’un moyen de transport ou d’une activité physique agréable à une nouvelle forme de compétition sportive. Au Québec, la Vieille Capitale vit émerger un premier club de vélo en 1898, et des championnats internationaux eurent lieu au Queen’s Park de Montréal dès 1899. Mais avant les inventions de matières textiles comme le nylon et l’élasthanne, les vêtements et accessoires de compétition confortables et performants étaient quasi inexistants. Voyons l’évolution de diverses pièces de l’équipement cycliste.
Le maillot
Avant les années 1940-1950, les hommes portaient un maillot en laine qui avait l’avantage d’épouser le corps en mouvement et d’être confortable. À l’aube du XXe siècle, ces maillots avaient même un col roulé! Il suffit cependant de regarder des photographies de cyclistes des années 1920-1930, comme celles des frères Peden –Torchy et Doug – lors de la course de six jours en 1937 à Montréal, pour saisir que le confort et la liberté de mouvement n’occupaient pas encore vraiment la pensée des fabricants. C’est dans les années 1940 que le vent commença à tourner grâce au tailleur italien Armando Castelli, qui confectionna les premiers uniformes cyclistes en jersey de soie, démontrant que le choix vestimentaire influait sur la vitesse et la performance.
Les souliers
Les chaussures connurent une évolution plus lente encore, puisque pendant très longtemps, elles furent en très grande majorité en cuir, de couleur noire, avec des semelles de bois ou de cuir. Graduellement, afin d’améliorer la stabilité du pied pendant l’effort, on ajouta des clous aux endroits stratégiques. Les matières plus souples comme le tissu, et donc plus aérodynamiques et confortables, ne furent disponibles sur le marché des souliers… qu’à partir des années 1980.
Le casque
Avant les années 1940, le casque n’évolua pas beaucoup lui non plus. Son origine semble française, et il était surnommé… le «casque à boudin » ! On doit son port plus officiel au coureur Jean Robic, après une dangereuse chute en 1946. C’est l’arrivée du polystyrène, à la fin des années 1970, qui rendra les casques plus légers et plus aérodynamiques.
La petite révolution des années 1980
📸: Pété Photographie
Aux alentours de la Seconde Guerre mondiale, plusieurs chimistes contribuèrent à graduellement changer l’univers textile par l’invention de l’élasthanne, du polyester et du nylon. Ce n’est qu’à partir de 1979 qu’on commença à utiliser ce dernier dans la confection de combinaisons moulantes qui permettaient une meilleure pénétration de l’air que les maillots et cuissards en jersey.
La place des entrepreneurs québécois
Les entrepreneurs québécois se mirent rapidement à utiliser ces matières dans la création et la production de combinaisons et d’accessoires performants et adaptés à un climat plus rigoureux. Des compagnies comme Louis Garneau, Kanuk, et plus récemment Peppermint Cycling Co. sont devenus des chefs de file dans le vêtement cycliste d’automne et même d’hiver, saison qui fait de plus en plus d’adeptes de la petite reine.
Les cyclistes de compétition furent les mieux placés pour développer des vêtements confortables, aérodynamiques et appropriés en toutes saisons. Louis Garneau fut, en 1983, un des premiers à se lancer dans l’aventure. Des vêtements à l’équipement en passant par les casques comportant la technologie MSB, il est un pionnier de l’évolution de la mode cycliste au Québec et dans le monde.
Dans le même ordre d’idées, soulignons le travail de l’ancienne coureuse Katy Saint-Laurent. Celle-ci, forte elle aussi de son expérience, fabrique, à l’intention des femmes qui pratiquent le vélo et d’autres sports toute l’année durant, des gammes alliant l’esthétisme à une confection technique qui permet de meilleures performances.
Le marché féminin est en croissance, et la compagnie québécoise Peppermint Cycling Co. crée également, grâce à ses fondatrices, les sœurs Michèle et Véronik Bastien, des vêtements de vélo fonctionnels et adaptés qui siéent au corps de la femme. En raison de notre climat, les vêtements doivent sécher rapidement (c’est pourquoi le polyester et l’élasthanne dominent désormais le marché) et contrôler les odeurs (ce à quoi on emploie les nouveaux produits comme le Polygiene®).
Le plus grand changement des dernières années se trouve toutefois dans l’accessibilité de ces produits haut de gamme. Peu importe où vous habitez, ces créations se magasinent maintenant en ligne et sont livrées… là où vous le souhaitez !
Pour en savoir plus!
Cyclisme: anatomie et mouvements, de Jennifer Laurita, éditions Broquet, 2014.
La fabuleuse histoire du cyclisme – tome 1, de Pierre Chany, éditions ODIL, 1979.
Vélo!, de Richard Moore et Daniel Benson, éditions Hurtubise, 2014.