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Reportage

Vélopartage nouvelle génération

24-11-2018
vélos en libre-service sans bornes

Les vélos en libre-service sans bornes de stationnement ont fait leur apparition partout dans le monde au cours de la dernière année et demie. Montréal n’a pas été épargnée par le phénomène.

Dire que l’arrivée de Dropbike sur l’île de Montréal le 31 août dernier en a surpris plus d’un serait un euphémisme. Sans tambour ni trompette, lastart-up torontoise de vélopartage a disséminé une petite cinquantaine de ses bicyclettes orange à travers la ville de Westmount, avec qui elle s’était préalablement entendue. Pendant tout l’automne, quiconque de passage dans cette banlieue de la métropole a donc pu enfourcher ces montures dénuées de stations fixes – c’est ce qui les différencie des Bixis. Pour déverrouiller les Dropbikes, il suffisait de télécharger l’application de la compagnie sur un téléphone intelligent, puis de numériser le code QR du vélo. Coût de la location: 1$ l’heure, débité automatiquement sur la carte de crédit

Contacté par Ville à vélo à la fin du mois de novembre dernier, l’état-major de Dropbike n’avait que de bons mots à dire sur le projet pilote qui tirait alors à sa fin: respect des douze zones délimitées pour stationner les vélos, bonne communication avec les autorités, commentaires apparemment élogieux des cyclistes… Emmett Meacher, responsable du marketing et des relations publiques, le qualifie sans hésiter de «succès». «À part de rares cas d’utilisateurs qui ont abandonné des vélos n’importe où, tout s’est bien déroulé. Aucun Dropbike ne s’est d’ailleurs fait voler», affirme-t-il. On estime que «quelques centaines d’utilisateurs» ont enfourché les vélos au cours du projet de deux mois et demi.

La réponse des Westmountais et de leurs voisins est «si satisfaisante» que Dropbike parle déjà de revenir dans la ville en 2018 – et d’éventuellement prendre de l’expansion sur l’ensemble de l’île de Montréal. Les intentions de l’entreprise sont claires. « Nous voulons répandre notre système partout à Montréal, surtout là où Bixi n’opère pas», lance Emmett Meacher. Et à plus long terme ? «D’ici cinq ans, notre souhait le plus cher est que Dropbike soit une solution de transport crédible vers laquelle se tournent instinctivement les Canadiens.» Rien de moins!

Phénomène mondial !

Le phénomène du vélo en libreservice de deuxième génération est loin d’être unique à Montréal. Partout dans le monde, des villes accueillent ces systèmes qui rappellent l’autopartage Car2go, version vélo. Rien que dans la dernière année, Paris, Bruxelles, Londres, New York, Washington, Melbourne et Sydney, notamment, ont vu apparaître une ou plusieurs entreprises de vélos en libre-service sans ancrages et accessibles au moyen d’un téléphone. Le modus operandi est relativement similaire à celui de Dropbike, dont on trouve aussi les vélos à Toronto et à Kingston. Cela dit, de nombreuses villes ont abandonné le système tant la vie des vélos 2.0 est éphémère.

C’est néanmoins à la Chine qu’on doit la paternité du VLS2.0. Grâce à des centaines de millions de dollars investis par des géants chinois de l’Internet comme Alibaba, les compagnies Ofo (aux vélos jaunes) et Mobike (aux vélos orange) s’y sont implantés dans plus de trente grandes villes depuis 2016. À elles deux, ces compagnies rejoindraient des dizaines de millions de jeunes utilisateurs partout au pays, mais aussi sur la planète. Selon ces leaders mondiaux dans le domaine, chacun évalué à plus d’un milliard de dollars américains, «le VLS2.0 est en train de changer le paysage urbain».

L’avènement de ces géants ne se fait toutefois pas sans heurts. Au mois de juillet dernier, le magazine Wired rapportait par exemple que les rues, les parcs et les trottoirs de la ville chinoise de Hangzhou se sont littéralement retrouvés infestés de vélos en libre-service sans bornes. Exaspérées, les autorités ont alors procédé à un ramassage en règle de ces ordures inusitées. Résultat: des dépotoirs remplis à ras bord de vélos abandonnés par milliers! Ce scénario s’est depuis répété ailleurs dans l’empire du Milieu, mais aussi à Seattle, aux États-Unis.

« Ce sont des vidanges »

La bonne nouvelle, c’est que Dropbike s’est arrangé pour que ces scènes ne se répètent pas ici, au Canada; en délimitant des zones où déposer ses vélos à la suite de leur utilisation, la compagnie torontoise a «créé la recette parfaite pour éviter le chaos», estime Emmett Meacher. La mauvaise, c’est qu’elle s’est tout de même attiré son lot de critiques, dont certaines sont carrément virulentes. Ses vélos ont par exemple été qualifiés de «cochonneries» et de «vidanges» par un utilisateur visiblement insatisfait sur la page Facebook Vélo d’hiver – Montréal. Position de conduite inconfortable, matériaux de piètre qualité et faible absorption des chocs ne sont que quelques-uns de ses reproches. Aussi, ces vélos ne visitent pas souvent un atelier d’entretien.

Un autre utilisateur – lui aussi mécontent – souligne quant à lui le caractère intrusif de l’application Dropbike, qui est nécessaire pour déverrouiller puis utiliser un vélo. Photos à l’appui, il constate qu’elle exige qu’on lui donne accès à une «panoplie plutôt effrayante» de droits. « L’application demande essentiellement de lui laisser le contrôle total de votre téléphone intelligent. Ma vie privée vaut plus que ça», déplore-t-il. Confronté à ce sujet, Dropbike prétend qu’elle récolte «un nombre limité de données anonymes sur les déplacements et les caractéristiques démographiques de ses utilisateurs afin de les partager avec les autorités». La Ville de Westmount a été incapable de nous confirmer cette information

Dernier point, mais non le moindre: celui du modèle d’affaires. D’après Dropbike, la location de vélo à 1$ par heure est suffisante pour assurer la rentabilité de l’entreprise. Une information dont doute fortement Pierre Parent, directeur du marketing et des communications chez Bixi Montréal. «La structure me semble obscure. Même si nous évaluons le prix de ces vélos à quelques centaines de dollars – ce qu’ils valent probablement –, j’ai peine à croire que cela fonctionne», avoue celui qui trouve exagérée l’affirmation selon laquelle Dropbike représente de la concurrence pour Bixi. «L’arrivée de Dropbike nous force certes à innover. Mais je confirme que nous ne nous sentons pas menacés!»

 

 

Quelques entreprises de VLS 2.0

Dropbike

Ofo

Mobike

Xiaoming Bike

GoBeeBike

Spin

LimeBike

Jump Bikes

oBike

Billy Bike

Pony Bike

 

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