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Reportage

Simone Boilard – La juniore qui les terrorise toutes

03-10-2018
Simone BSoilard, 2018 Road Nationals

Une arrivée avec une avance confortable aux Championnats canadiens, mais disqualification pour braquet non conforme

À 17 ans à peine, Simone Boilard cumule déjà une feuille de route à rendre folles de jalousie les plus grandes championnes. Portrait de cette jeune surdouée promise à un brillant avenir.

Simone Boilard n’a pas la grosse tête. Pourtant, elle le pourrait. Sa saison 2017 de compétition sur route, la coureuse de 17 ans l’a survolée. À sa première année dans la catégorie juniore (17-18 ans), la cycliste de Québec a notamment terminé troisième de l’épreuve sur route aux Championnats canadiens à Gatineau. Puis elle a raflé les maillots de meneuse au classement général, de meilleure sprinteuse et de meilleure grimpeuse – bref, TOUS les maillots – au Tour de la relève internationale de Rimouski.

L’adolescente ne s’est pas contentée d’asseoir sa domination sur les filles de son âge. Que nenni. En mai de cette année-là, elle a mis le grappin sur la deuxième place du Grand Prix de Saint-Raymond, une course réservée aux moins de 23 ans, avant de remporter quelques jours plus tard l’étapereine de la Killington Stage Race, qui s’achevait par un col de 8 km, dans la catégorie séniore. En août, Simone Boilard a gagné l’or à l’épreuve de cyclisme sur route des Jeux du Canada (U23), à Winnipeg. Une belle mise en jambes en vue de ses premiers Championnats du monde juniors, en septembre, où elle a conclu sa saison de rêve en sécurisant la huitième place.

Malgré tout, Simone Boilard n’a pas la tête enflée. Au contraire, elle a les pieds sur terre, bien retenus par des proches qui souhaitent sincèrement le meilleur pour elle. À commencer par son père, Pierre Boilard, fin quarantaine, lui-même un fichu de bon rouleur – il a terminé premier en 30 h 34 min 25 s au 808 km du Défi Bonneville, l’année dernière. « J’aimerais dire que les ardeurs de Simone sont difficiles à modérer, mais ce n’est pas le cas. Elle a une vieille âme. En dépit de son jeune âge, elle doute constamment de ses capacités, elle ne tient rien pour acquis », affirme le coureur cycliste amateur et ancien skieur alpin.

Même son de cloche du côté de son entraîneuse de toujours, Christine Gillard. « Je ne parle jamais de gagner avec elle, mais bien de se rendre au bout d’un processus en y mettant tous les efforts requis », nuance celle qui a été nommée entraîneuse de l’année sur route par Cyclisme Canada en 2017. Selon elle, cela reflète bien la maturité exceptionnelle dont fait preuve sa jeune protégée. « Simone, c’est une travaillante qui ne s’endort pas sur ses lauriers, qui veut toujours plus. »

L’amour de l’effort

Simone Boilard

D’aussi loin qu’elle se souvienne, Simone Boilard a toujours pédalé. Dès sa plus tendre enfance, elle est accrochée à l’arrière du vélo de son père pour de longues randonnées père-fille – une image ironique puisqu’elle le décroche dorénavant à tous coups (« sauf quand elle se balade », précise le paternel). À quatre ans, elle emboîte le pas à sa grande sœur qui pratique le cyclisme sur route et fait connaissance avec son entraîneuse, Christine Gillard. Peu de temps après, la néophyte s’aligne sur la ligne de sa première course sanctionnée à vie, dans la catégorie bibitte.

C’est au début de l’adolescence que le talent de Simone Boilard commence à s’affirmer. Celle qui est alors inscrite au volet sport-études de l’école Cardinal-Roy en cyclisme n’hésite pas à bouffer plus que sa part de vent lors des sorties en groupe. Contrairement à ses consœurs, elle n’a pas besoin d’être poussée pour pédaler. Ça lui vient tout seul, comme un don – une bénédiction, diront certains. « J’ai essayé plusieurs sports lorsque j’étais jeune, dont le ski alpin et le ski de fond. Le vélo était toutefois celui où l’effort m’était le plus naturel. Ça rejoint mon tempérament de solitaire, mon amour de l’effort », explique-t-elle en entrevue à Vélo Mag.

L’année 2016 aura été celle de la confirmation. Simone Boilard, alors âgée de 15 ans, dispute sa dernière saison en tant que cadette, catégorie qu’elle domine outrageusement, et elle est surclassée afin de prendre part aux Championnats canadiens juniors de cyclisme sur route. Contre toute attente, elle s’y débrouille plutôt bien. Très bien même, puisqu’elle défie tous les pronostics et remporte le titre national au contre-la-montre, en plus d’atterrir sur le podium à la course sur route et au critérium. Malgré la preuve de ses capacités exceptionnelles, elle ne peut participer aux Championnats du monde, qui ont lieu cette année-là au Qatar.

 

Une situation frustrante, certes, mais sur laquelle Simone Boilard passera rapidement grâce à son entraîneuse. « Je lui ai fait comprendre que de tels règlements existent pour empêcher de jeunes surdouées comme elle de brûler les étapes. De ne pas tout réaliser trop vite », raconte Christine Gillard. Son rendez-vous avec sa première expérience à l’échelle internationale, c’est finalement lors des Mondiaux de 2017 qu’elle l’aura. Sa huitième place en Norvège représente d’ailleurs la meilleure performance d’une Québécoise à cette course depuis 1999. Cette année-là, une certaine Geneviève Jeanson avait remporté la victoire…

« J’ai essayé plusieurs sports lorsque j’étais jeune, dont le ski alpin et le ski de fond. Le vélo était toutefois celui où l’effort m’était le plus naturel. Ça rejoint mon tempérament de solitaire, mon amour de l’effort. »

Simone Boilard

2018 et au-delà

Simone Boilard 3

Une victoire au
contre-la-montre junior
aux Championnats
canadiens 2018

Les comparaisons entre la championne déchue et Simone Boilard s’arrêtent toutefois là. À la différence de Geneviève Jeanson, qui a reconnu s’être dopée pendant toute sa carrière professionnelle, Simone Boilard est mieux entourée et d’une génération différente, qui a grandi en se faisant casser les oreilles avec la dope et les «affaires». Surtout, elle sait qu’il n’y a pas que le vélo dans la vie, elle qui poursuit actuellement ses études en sciences humaines au Cégep Garneau dans l’espoir de travailler plus tard dans le monde de l’éducation. « Je me permets de croire que je suis au-dessus du dopage. Je comprends pourquoi [Geneviève Jeanson] l’a fait. Je n’en trouve pas moins le geste inacceptable et répréhensible. »

Au moment d’écrire ces lignes, Simone Boilard a déjà une bonne récolte de maillots pour la saison en cours. Aux Championnats canadiens de 2018, elle a remporté le contre-la-montre avec plus d’une minute d’avance et dominé le critérium; en course sur route, elle est arrivée près de 8 minutes avant ses poursuivantes mais a été disqualifiée pour braquet non conforme. Bref, son passage chez les grandes et dans l’arène du professionnalisme s’annonce aisé. « Cette saison, nous avons augmenté graduellement les charges d’entraînement, de manière à me préparer à franchir cette étape. Les courses sont bien plus longues et dures chez les élites », analyse-t-elle. Et au-delà? « Je rêve de participer aux Jeux olympiques. Ceux de 2024, à Paris, sont envisageables », avoue-t-elle candidement, bien au fait qu’elle a à la fois la tête, les jambes et l’entourage pour y arriver.

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